Communiqué final du Point de contact national du Canada - Endeavour Mining Corporation et un syndicat

24 octobre 2017

Résumé

1. La demande d’examen concernant les activités minières de Endeavour Mining (appelée ci-dessous « Endeavour » ou « l’entreprise ») au Mali, a été soumise au point de contact national (PCN) du Canada le 19 mai 2015 par le Collectif des anciens travailleurs de SAER-Endeavour/Kenieba-région de Kayes, représenté par le secrétaire général de l’organisation syndicale Fédération Nationale des Mines et de l’Énergie (FENAME) (appelée ci-dessous « le déclarant ») au nom des anciens et actuels employés de l’entreprise. La demande d’examen vise la mine d’or Tabakoto d’Endeavour, située à Kenieba, dans la région Kayes, au Mali, exploitée par SEMICO, une filiale d’Endeavour. À l'époque du dépôt du dossier, Endeavour était une société minière canadienne ayant son siège social en Colombie-Britannique.

2. Dans la demande d'examen, le déclarant allègue le congédiement injustifié de 72 employés en février 2013 et fait une plainte relative à l'exposition de certains employés au plomb, ce qui aurait nui à leur santé. Il allègue aussi que ces préoccupations sont en contravention du chapitre des concepts et des principes et de celui sur les principes généraux des Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales (Principes directeurs de l’OCDE).

3. Le PCN est un mécanisme d’encadrement du dialogue pour aider les parties à régler des problèmes liés à la mise en application des Principes directeurs de l'OCDE par des entreprises multinationales. Le PCN du Canada a suivi les procédures prescrites dans les Principes directeurs de l'OCDE (section C, page 81 de l’édition de 2011) ainsi que le Guide de procédure du point de contact national. Un résumé du processus est fourni dans l'annexe.

4. L'évaluation initiale du PCN a conclu que le dossier était fondé et que les deux points pourraient bénéficier d'un dialogue entre les parties, même si une démarche judiciaire est en instance au Mali sur certaines questions d'emploi se rapportant à ce dossier. Le PCN a proposé d’encadrer le dialogue, ce que les parties ont accepté. Le dialogue encadré par le PCN s'est déroulé entre septembre 2016 et mars 2017 et a consisté en une vidéoconférence de deux jours et une série de conférences téléphoniques tenues séparément avec les parties. L'ensemble du processus du PCN s'est déroulé en français et en anglais, ce qui a engendré des défis supplémentaires.

5. Le PCN reconnaît que l'entreprise a fait preuve de bonne volonté et de transparence durant le processus et s'est engagée à prendre une série de mesures, dont certaines se rapportant à la santé et à la sécurité au travail ont été prises de façon proactive durant le dialogue. Le dialogue n'a pas abouti en soi à une solution mutuellement acceptable entre les parties, mais des résultats positifs concrets en sont sortis sous la forme d'une liste de mesures et d'engagements, de la part d'Endeavour, sur les enjeux de l’emploi et de la santé, tel qu’il est décrit dans le présent communiqué final. De l'avis du PCN, cette instance a donné lieu à une discussion importante et utile des attentes inhérentes aux Principes directeurs de l'OCDE à l'égard du devoir de diligence raisonnable d'une entreprise envers ses sous-traitants par rapport aux incidences liées à la responsabilité sociale de l'entreprise ainsi qu'aux problèmes de communication et de transparence lorsque des changements importants surviennent dans l'effectif d'une entreprise.

6. Le déclarant s'est dit reconnaissant du rôle et du processus du PCN. Le PCN remercie les deux parties de leur coopération et présente une série de recommandations à Endeavour, ci-dessous, qui visent à renforcer la mise en œuvre des Principes directeurs par l'entreprise.

Recommandations et demande du PCN

7. Recommandation no.1 : Le PCN recommande qu'Endeavour examine ou mette sur pied un processus grâce auquel l'entreprise peut s'acquitter du devoir de diligence raisonnable par rapport à ses sous-traitants, en accord avec le chapitre II, paragraphe 12 des Principes directeurs de l'OCDE, en particulier en ce qui concerne les questions liées à la main-d'œuvre et à la santé et la sécurité au travail.

8. Recommandation no.2 : Le PCN recommande qu'Endeavour communique publiquement les efforts qu'elle déploie par rapport à la recommandation ci-dessus et aux mesures prises par tout sous-traitant exploitant le laboratoire de la mine Tabakoto afin d'atténuer les risques pour la santé et la sécurité au travail, en particulier ceux qui se rapportent aux matières dangereuses, y compris le plomb.

9. Recommandation no.3 : Le PCN recommande qu'à l'avenir, Endeavour communique d'une façon plus transparente et opportune avec les employés et leurs représentants sur des questions d'emploi qui pourraient entraîner des changements et des répercussions importantes pour les employés.

10. Le PCN demande à Endeavour de faire un rapport par écrit au PCN du Canada d'ici le 1er juillet 2018 sur 1) les efforts déployés pour donner suite aux trois recommandations du PCN; et 2) la façon dont elle a donné suite à tous les engagements précis qu'Endeavour a pris durant le dialogue encadré par le PCN, énumérés dans le présent communiqué final. Le PCN aimerait publier un communiqué de suivi environ douze (12) mois après la publication du présent communiqué final, en prenant en compte la réponse de l'entreprise.

Demande d'examen

11. Dans sa demande, le déclarant allègue qu’Endeavour n’a pas respecté les Principes directeurs de l’OCDE en raison de problèmes relatifs aux pratiques liées à la main-d’œuvre et à la santé et sécurité des employés. La demande d'examen porte sur : 1) une allégation de congédiement injustifié; et 2) un problème de santé et sécurité au travail lié à l'exposition au plomb, qui sont décrits ci-dessous :

  • 1) Questions liées à la main-d’œuvre : Dans sa demande d’examen, le déclarant allègue que l’entreprise n’a pas réembauché 72 employés, dont 11 étaient syndiqués, par suite de la reprise de la mine de l’employeur précédent, Avion Gold Corp, à la fin de 2012. Avant l’acquisition de la mine par Endeavour, Avion Gold Corp. avait recours aux services de l’agence de placement de main-d’œuvre SAER Emploi. Endeavour a décidé de mettre fin au recours aux services de SAER Emploi en février 2013 et de demander à SEMICO (la filiale qui exploite la mine) de réembaucher directement les 933 personnes qui étaient employées par l'entremise de SAER. Toutefois, 72 de ces employés n’ont pas été réembauchés. Le déclarant allègue que tous les employés s’étaient vu promettre la réembauche dans le cadre du transfert et que, depuis, d’autres personnes ont été embauchées dans des postes aux qualifications similaires. Il allègue aussi que le Code du travail malien a été violé, que SEMICO était le véritable employeur, et non l’agence de placement, et que la loi malienne confère aux anciens employés un droit prioritaire à la réembauche. Un facteur qui vient compliquer le dossier est le fait que l'entreprise et certains anciens employés représentés par le déclarant sont parties dans une affaire devant les tribunaux maliens qui en est à son deuxième appel. Cette cause concerne le montant de l’indemnité de départ à laquelle les travailleurs ont droit (voir la section « Évaluation initiale du PCN »).

  • 2) Niveaux de plomb dans le sang : Les renseignements complémentaires de la demande d’examen font valoir que de nombreux employés affichent des niveaux de plomb dans le sang supérieurs à 100 microgrammes de plomb par litre de sang, soit 10 µg/dl, un seuil d'empoisonnement au plomb selon les allégations du déclarant. Ce dernier allègue que l’exposition des employés au plomb dans le laboratoire de la mine Tabakoto mène à des taux élevés de plomb dans le sang qui causent des problèmes de santé chez les employés.

12. Dans la demande d’examen, le déclarant a cité les deux paragraphes suivants des Principes directeurs de l’OCDE :

  • Chapitre II. Principes généraux
    Paragraphe A.1: « [Les entreprises devraient :] Contribuer aux progrès économiques, environnementaux et sociaux en vue de parvenir à un développement durable. »

  • Paragraphe A.2 : « [Les entreprises devraient :] Respecter les droits de l’homme internationalement reconnus vis-à-vis des personnes affectées par leurs activités. »

  • En plus du chapitre II – Principes généraux, le PCN estime que le chapitre V – Emploi et relations professionnelles est pertinent en ce qui concerne les deux problèmes soulevés dans la demande d’examen. 

13. Le déclarant a demandé l’aide du PCN afin d’entreprendre un dialogue avec l’entreprise en vue de régler les problèmes soulevés.

À propos du déclarant

14. Le déclarant est le collectif des anciens travailleurs de SAER-Endeavour Kenieba-région de Kayes (Mali) représenté par M. Traoré Yacouba, secrétaire général du syndicat Fédération nationale des mines et de l’énergie (FENAME), situé à Bamako, au Mali.

À propos de l'entreprise

15. Endeavour Mining Corporation est une entreprise des Iles Cayman avec un bureau d’enregistrement aux Iles Cayman. Elle est listée à la bourse de Toronto. Au moment de la réception de la demande d’examen et jusqu’en mars 2016, Endeavour Mining Corporation avait une place d’affaires à Vancouver au Canada. Le siège social actuel est à Londres au Royaume-Uni. Sa filiale malienne, SEMICO SA détient les permis d’exploitation minière de la mine de Tabakoto au Mali. Étant donné que la place d’affaires de Endeavour était située au Canada au moment où la demande a été reçue et que le Mali n’adhère pas aux Principes directeurs de l’OCDE et n’a donc pas de PCN, le PCN du Canada a estimé qu’il avait le mandate de recevoir cette instance spécifique.

Dates principales

16. Voici les principales étapes du processus :

  • 19 mai 2015 : le PCN reçoit la demande d'examen du déclarant
  • 22 mai 2015 : le secrétariat du PCN accuse réception de la demande d'examen et demande des renseignements supplémentaires au déclarant
  • 23 mai au 17 août 2015 : le déclarant soumet au PCN un enjeu à ajouter à la demande d'examen (sur la santé) et de la documentation supplémentaire (sur les enjeux de main-d'œuvre et de santé)
  • 22 juin 2015 : le PCN communique avec le PDG d'Endeavour
  • 6 juillet 2015 : Endeavour fournit au PCN sa réponse à la demande d'examen
  • 18 septembre 2015 : l'ébauche du rapport de l'évaluation initiale est fournie aux parties dans les deux langues officielles aux fins de vérification des faits
  • 6 novembre 2015 : le rapport de l'évaluation initiale dans les deux langues officielles est envoyé aux parties avec une offre de dialogue encadré
  • 13 novembre 2015 : le déclarant accepte de participer au dialogue encadré
  • 27 novembre 2015 : l'entreprise accepte de participer au dialogue encadré
  • 20 mai 2016 : les parties signent les modalités du dialogue encadré
  • Mai à août 2016 : les employés et d'ex-employés concernés par l'affaire sont identifiés et la délégation de pouvoirs au déclarant est obtenue
  • 29-30 septembre 2016 : réunion de dialogue encadré par vidéoconférence jumelée à une téléconférence.
  • Octobre 2016 à mars 2017 : poursuite du dialogue par conférence téléphonique entre le PCN et chaque partie séparément (avec l'entreprise : 3 novembre 2016; 12 janvier 2017 et 22 mars 2017; avec le déclarant, 9 novembre 2016 et 14 février 2017); échange intensif de renseignements entre les parties par courriel par l'entremise du PCN; compte rendu des progrès de certaines mesures prises par Endeavour, comme convenu durant le dialogue
  • Mars 2017 : fin du dialogue encadré
  • 5 octobre 2017 : ébauche du communiqué final envoyée aux parties (dans les deux langues officielles)
  • 10 octobre 2017 : le déclarant envoie des commentaires sur l’ébauche de communiqué final
  • 20 octobre 2017 : l’entreprise envoie des commentaires sur l’ébauche de communiqué final.

Évaluation initiale du PCN

17. Il convient de rappeler qu’une évaluation initiale n'est pas un jugement quant à savoir si le comportement ou les actions de l'entreprise en question respectent les Principes directeurs de l'OCDE, bien que le PCN puisse rendre une telle décision à sa discrétion. Une évaluation initiale est une indication si, selon le PCN, le dialogue serait utile pour résoudre le différend lié aux problèmes soulevés.

18. Le PCN du Canada a examiné tous les renseignements fournis dans la soumission initiale de la demande d’examen, il a communiqué avec l’entreprise et a demandé des renseignements supplémentaires au déclarant. 

19. Il a ensuite examiné la documentation supplémentaire présentée par le déclarant ainsi que l’information fournie par l’entreprise et mené une évaluation initiale en fonction des critères énumérés dans le guide de procédure du PCN du Canada et les lignes directrice de procédure des Principes directeurs de l’OCDE, comme suit :

  • l’identité de la partie concernée et de son intérêt dans l’affaire;
  • le caractère significatif de la question et des éléments fournis à l’appui;
  • le lien apparent entre les activités de l’entreprise et la question soulevée dans la circonstance spécifique;
  • la pertinence des lois et procédures applicables, notamment des décisions de justice;
  • la manière dont des questions similaires sont (ou ont été) traitées au niveau national ou international;
  • l’intérêt que présente l’examen de la question concernée au regard des objectifs visés par les Principes directeurs et de l’efficacité de leur mise en œuvre.

20. A la suite de son évaluation initiale, le PCN en a conclu que les deux enjeux soulevés (santé et emploi) sont significatifs en ce qui concerne l'application des Principes directeurs de l'OCDE. Il a aussi conclu que la documentation justificative fournie par le déclarant sur ces questions, bien qu'avec différents degrés de spécificité, lui a permis de conclure que l'affaire méritait d’être approfondie, et que les deux enjeux pourraient bénéficier d'un dialogue entre les parties.

21. L'existence d'un litige en instance devant les tribunaux maliens sur la question relative à la main-d'œuvre n'a pas empêché le PCN de proposer un dialogue. En outre, l'affaire judiciaire porte explicitement sur le calcul de l'indemnité de départ due à certains employés congédiés, un point que le déclarant n'a pas soulevé dans sa demande d’examen. Le PCN a été d’avis qu'un processus de dialogue plus général pourrait aider à régler les problèmes dont les tribunaux ne sont pas saisis et favoriserait la mise en œuvre des Principes directeurs de l'OCDE.

22. En vertu de l'article 3.5 du guide de procédure du PCN, le PCN a donc proposé d'aider les parties en cause au moyen d'un dialogue facilité (ou encadré), dans lequel les parties pourraient collaborer au règlement des points soulevés dans la demande d'examen. Le PCN est reconnaissant à l'entreprise d'avoir accepté l'offre de dialogue et fait preuve d'un esprit d'ouverture et de franchise dans la discussion.

23. Le PCN remercie les deux parties d'avoir travaillé de façon constructive dans un esprit de transparence et consenti à ce que tous les documents qu'elles lui ont fournis soient communiqués à l'autre partie, tant lors de l'évaluation initiale que du dialogue encadré.

Le dialogue encadré

24. Les modalités du dialogue ont été négociées avec les parties à l'avance et ont dû prendre en compte la difficulté d'accommoder des parties se trouvant dans quatre pays différents (Canada, Monaco, Côte-d'Ivoire et Mali) en plus des participants du PCN à Ottawa, au Canada de même que les questions de langue (français et anglais).

25. Le PCN a rédigé les modalités du processus de dialogue en consultation avec les deux parties. Les modalités comportaient des dispositions concernant les attentes du PCN, de même que les règles de confidentialité et de bonne foi de la part des parties et elles ont été signées en mai 2016. Avant le début du dialogue en tant que tel, beaucoup de temps a été consacré à confirmer l'identité et la délégation de pouvoirs des 33 ex-travailleurs que le déclarant représentait sur la question de la main-d'œuvre, et celle des 12 personnes sur la question de santé. Il a fallu aussi obtenir le consentement écrit des 12 personnes afin de permettre au PCN de divulguer à l'entreprise les renseignements médicaux confidentiels qu'il avait reçus du déclarant, une exigence en droit canadien.

26. Une vidéoconférence combinée à une téléconférence a eu lieu les 29 et 30 septembre 2016. Le déclarant, accompagné de l'un des ex-employés, a participé par liaison vidéo depuis l'ambassade du Canada à Bamako, avec le PCN qui était à Ottawa, au Canada. Trois représentants de l'entreprise (deux vice-présidents principaux et un conseiller juridique) étaient en liaison téléphonique de Monaco, d’Abidjan et de Nouvelle-Écosse (Canada), respectivement. L'interprétation consécutive en français et en anglais a été assurée ce qui a considérablement rallongé la vidéoconférence. Le dialogue a été animé par le PCN lui-même. Un bon échange de points de vue a eu lieu entre les parties, suivi de l'échange d'autres documents et de commentaires écrits par les parties, qui ont dû être traduits en français et en anglais. La vidéoconférence a permis d'accomplir des progrès notoires, mais étant donné les difficultés logistiques, le PCN a ensuite mené plusieurs conférences téléphoniques bilatérales avec chaque partie, d'octobre 2016 à février 2017. Les parties ont exprimé leur reconnaissance au PCN pour avoir organisé le dialogue ainsi qu’à l'ambassade du Canada à Bamako d’avoir accueilli le déclarant pour la vidéo-conférence.

27. Le PCN estime utile de résumer ici les positions respectives des parties et la réparation demandée par le déclarant qui s’élève à un total approximatif de 1 500 000 dollars canadiens une fois convertis de la monnaie légale au Mali (CFA). Le déclarant a demandé la réintégration des 33 travailleurs avec solde et avantages sociaux rétroactifs à titre d'indemnité pour la période de licenciement de 36 mois. En ce qui concerne les questions liées à la santé, le déclarant a demandé une indemnité financière pour les effets néfastes de l'empoisonnement au plomb allégué sur la santé des 12 employés, un remboursement des frais médicaux et le paiement des arriérés pour les cotisations à l'assurance-maladie. Le déclarant a fourni des résultats des niveaux de plomb dans le sang obtenus vers 2012 pour les 12 employés en question. Le déclarant a également déclaré que ALS a débuté au laboratoire seulement en 2013 et que Endeavour s’est déchargé de ses responsabilités en matière de santé et sécurité sur ALS.

28. Sur les questions liées à la main-d'œuvre, la position de l’entreprise était la suivante:

  • SAER-Emploi, et non SEMICO, était l'employeur des 933 personnes travaillant à la mine durant la période du contrat entre SEMICO et SAER. Par conséquent, seul SAER-Emploi peut réintégrer les anciens employés qui n’ont pas été réembauchés par SEMICO;
  • la procédure de cessation d’emploi par SAER-Emploi a été autorisée par le ministère du Travail le 28 janvier 2013;
  • SEMICO s'était engagée à réembaucher tous les travailleurs, mais certains employés se sont opposés à leur transfert le 21 février 2013 et ont demandé le paiement de leur indemnité de départ par SAER, ce qui a été fait pour tous les employés;
  • SEMICO a décidé de réembaucher les employés dont elle avait besoin pour combler ses besoins opérationnels parmi le groupe d'anciens employés.

29. Au sujet des questions de santé, la position de l’entreprise était que le déclarant n’a fourni aucune preuve pour justifier sa réclamation monétaire associée au taux élevé de plomb dans le sang et les effets néfastes sur la santé des 12 travailleurs et ex-travailleurs. L’entreprise a aussi allégué que les résultats de tests sanguins fournis par le déclarant n’avaient pas été authentifiés. L’entreprise a toutefois pris les allégations au sérieux et a indiqué que les employés font l'objet de tests réguliers des niveaux de plomb dans le sang en accord avec les protocoles de l'entreprise et que les mesures qui s'imposent sont prises, s'il y a lieu. Elle a aussi fait savoir que cette affaire avait déclenché une évaluation de la manipulation et de la gestion du plomb et des pratiques d'entretien au laboratoire, ainsi qu'une formation supplémentaire du personnel et qu'elle avait recommandé une amélioration par rapport à l'application des normes d’ALS, et des pratiques de formation et d'entretien.

Résultats

30. L'entreprise n'était pas d'accord avec l'indemnité et la réintégration demandées par le déclarant. Cela dit, l'entreprise a pris les engagements et les mesures ci-dessous durant le dialogue encadré.

  • 1. Enjeux liés à la santé
    • 1.1 Niveaux de plomb dans le sang
      • 1.1.1 L'entreprise s'est engagée à faire tester les niveaux de plomb dans le sang des 12 personnes identifiées et représentées par le déclarant; l'entreprise s'est engagée à communiquer avec les personnes d'entre elles qui ne travaillent plus à la mine pour qu'elles puissent être testées.
      • Les 12 personnes ont été testées en octobre et en novembre 2016, le transport, le logement et les repas ayant été fournis à une personne qui ne travaille plus à la mine et qui habite à quelque 800 kilomètres de l'endroit où les tests ont été effectués. Les résultats ont été transmis aux personnes concernées. Endeavour a donné l'assurance au PCN et au déclarant que parmi les 12 personnes testées, celles qui travaillent encore à la mine continueraient d'être testées périodiquement et que les mesures nécessaires seraient prises, le cas échéant, conformément aux procédures et aux normes de l'entreprise par rapport à l'exposition d'employés au plomb.
      • 1.1.2 Le déclarant a demandé des garanties qu'Endeavour n'exercerait pas de discrimination ni de représailles contre les personnes représentées par le déclarant en fonction de leurs dossiers médicaux ou du fait qu'elles avaient porté plainte auprès du PCN. Endeavour a assuré le PCN que son éthique et ses pratiques d'affaires lui interdisaient de se comporter d'une façon discriminatoire.
    • 1.1 Procédures de santé et sécurité
      • 1.1.1 Endeavour s'est engagée à communiquer au PCN et au déclarant les procédures de contrôle du plomb et la documentation de la formation sur la protection contre l'exposition au plomb de son entrepreneur ALS, responsable du laboratoire de la mine où le plomb est manipulé, ce qu'elle a fait. Une partie de cette documentation a été mise à jour en juillet 2015 et, de nouveau, en novembre 2016.
      • 1.1.2 La formation sur les dangers liés à l'exposition au plomb a été donnée aux employés du laboratoire de la mine en septembre 2016, avec l'entière participation d'ALS.
      • 1.1.3 Endeavour s'engage à hausser le niveau de rendement en matière de santé et de sécurité au travail dans tous les secteurs de ses opérations, ce qui comprend le Mali et ailleurs en Afrique; Endeavour s'engage à respecter les normes de santé et de sécurité au travail reconnues sur la scène internationale, notamment les normes attendues de fournisseurs de services et de sous-traitants, tel que l'exploitant du laboratoire à Tabakoto, en mettant particulièrement l'accent sur les substances dangereuses, dont le plomb.
  • 2. Enjeux liés à la main-d'œuvre
    • 2.1 Endeavour reconnaît que les communications de l'entreprise concernant l'annulation du contrat avec SAER-Emploi et le changement officiel d'employeur au début de 2013 auraient pu être gérées d'une façon plus compatible avec les principes énoncés dans les Principes directeurs de l'OCDE. Toutefois, Endeavour a soutenu qu'à l'époque de l'annulation du contrat, elle s'était conformée aux exigences juridiques locales en vigueur. Le PCN reconnaît la divergence entre les positions des parties sur un manquement allégué au Code du travail malien et souligne qu'il n'est pas à même de se prononcer sur cette question de droit.
    • 2.2 Endeavour s'est engagée à recevoir les demandes de personnes identifiées par le déclarant dans le cadre de ce dialogue du PCN, si ces personnes identifiées devaient manifester un intérêt pour des possibilités d'emploi à la mine Tabakoto. Endeavour conservera leurs demandes pendant une période de 12 mois et elles seront prises en compte si SEMICO ouvre des postes pour des travailleurs possédant des qualifications comparables à celles des chercheurs d'emploi.
  • 3. Responsabilité sociale de l'entreprise
    • 3.1 Endeavour s'engage à adopter, mettre en œuvre et diffuser le Guide de l'OCDE sur le devoir de diligence pour un engagement constructif des parties prenantes dans le secteur extractif, qui comporte une section consacrée à l'engagement avec les travailleurs et les syndicats.
    • 3.2 Endeavour s'engage à endosser officiellement et publiquement les Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales au sein de son cadre stratégique sur la responsabilité sociale de l'entreprise, et à diffuser et mettre en œuvre les Principes directeurs à l’échelle de ses différentes opérations, notamment en favorisant leur adoption par ses fournisseurs de services et ses sous-traitants, tels que les agences de placement et les exploitants de laboratoires.

Conclusions du PCN

31. Le PCN tient à remercier Endeavour et le déclarant pour leur coopération constructive et ouverte avec lui dans le processus. Endeavour a systématiquement fait preuve de bonne volonté et de bonne foi tout au long de l'évaluation initiale et du dialogue. Malgré des délais occasionnels en raison d'autres exigences opérationnelles, les réponses et les contributions écrites de l'entreprise étaient généralement opportunes, transparentes et pertinentes pour les demandes du PCN. Le PCN estime qu'il était de l'intérêt de l'entreprise de voir dans ce processus du PCN une occasion opportune de faire le point sur la conformité aux normes et aux procédures de santé et de sécurité dans le laboratoire de la mine Tabakoto en ce qui concerne la manipulation du plomb et l'exposition à cette substance. Le PCN souligne la diligence dont l'entreprise a fait preuve pour réévaluer les niveaux de plomb dans le sang des employés avant la fin du dialogue et pour communiquer et mettre à jour les procédures de santé et sécurité. Le PCN regrette que l'entreprise et le déclarant n'aient pu s'entendre sur une issue ou un recours mutuellement satisfaisant. Cela dit, le PCN se réjouit des mesures et des engagements pris par Endeavour, en particulier en ce qui concerne la santé, et y voit un pas positif. Le PCN sait gré à Endeavour d'avoir accepté de divulguer la liste des mesures et des engagements dans le communiqué final.

32. Le déclarant a manifesté un esprit de coopération satisfaisant et ouvert dans la plus grande partie du dialogue. Il a fourni de la documentation aux fins du processus, répondu aux demandes du PCN dans les meilleurs délais et fait des efforts pour présenter sa position à l'entreprise. Toutefois, le PCN a été informé, en janvier 2017, d'une plainte officielle déposée par le déclarant auprès de la police locale à Tabakoto contre l'entreprise au nom de 49 travailleurs ou ex-travailleurs de la mine, y compris certains des travailleurs représentés dans le dossier soumis au PCN. La plainte comportait des allégations de contamination d'employés par des matières dangereuses, dont le plomb. Le déclarant n'a pas nié ce fait nouveau lors de la conférence téléphonique de février 2017 avec le PCN. On ignore si le procureur local a entendu la plainte. L'entreprise a exprimé au PCN sa déception face à cette situation et dit qu'il s'agissait d'un acte de mauvaise foi et de manipulation du processus de la part du déclarant, étant donné que le dialogue encadré par le PCN était en cours.

33. Le PCN a informé le déclarant que si elle ne constituait pas un manquement à la confidentialité, la plainte déposée auprès de la police nuisait à la capacité du PCN de bâtir la confiance et de faire plus de progrès et était contraire à l'engagement de dialoguer de bonne foi. Le PCN a mis fin au dialogue en mars 2017 puisque, de toute façon, il avait atteint un point où tout autre progrès était impossible.

34. Sur la question du licenciement, le PCN est d'avis que les communications et la transparence n'avaient pas été optimales dans la période précédant, et durant, l'annulation du contrat de SEMICO avec SAER-Emploi et le transfert des employés à SEMICO. Endeavour l'a reconnu durant le dialogue. Tout en reconnaissant l'existence d'un cadre juridique, le PCN estime que les circonstances entourant la résiliation du contrat original et la réembauche par SEMICO, ont manqué de clarté, ce qui peut avoir dérouté les travailleurs, en particulier puisque le processus a comporté leur licenciement par SAER et le paiement de droits d'indemnité de départ avant leur réembauche par SEMICO. En outre, le PCN est d'avis que le fardeau de clarifier la relation employé-employeur incombe à l'employeur et non aux employés ou aux sous-traitants.

35. Le PCN désire souligner plusieurs dispositions des Principes directeurs qui s'appliquent en l'espèce :  

  • Le chapitre V - Emploi et relations professionnelles, paragraphe 6 (page 43) dit que, lorsqu’elles envisagent d’apporter à leurs opérations des changements susceptibles d’avoir des effets importants sur les moyens d’existence de leurs travailleurs, notamment en cas de fermeture d’une entité entraînant des licenciements collectifs, les entreprises devraient en avertir dans un délai raisonnable les représentants de leurs travailleurs et, le cas échéant, les autorités nationales compétentes et coopérer avec ces représentants et autorités de façon à atténuer au maximum tout effet défavorable. Il est aussi suggéré dans les Principes directeurs que des moyens pourront être également utilisés pour que s’instaure une coopération constructive entre l’employeur et les employés en vue d’atténuer les effets de telles décisions.

  • Le chapitre II – Principes généraux, paragraphe 14 (page 23) dit que les entreprises devraient s’engager auprès des parties prenantes concernées en leur donnant de réelles possibilités de faire valoir leurs points de vue lorsqu’il s’agit de planifier et de prendre des décisions. Le PCN se réjouit de l'engagement de l'entreprise à mettre en œuvre et diffuser le Guide de l'OCDE sur le devoir de diligence pour un engagement constructif des parties prenantes dans le secteur extractif. Le guide, qui comporte des orientations ciblées pour les travailleurs, offre des outils concrets aux entreprises pour les aider à mettre en œuvre les dispositions des Principes de l'OCDE sur la diligence raisonnable à l'égard de l'engagement constructif des parties prenantes, décrites au paragraphe 14 du chapitre II déjà cité.

  • Le chapitre II – Principes généraux, paragraphe 12 (page 23) impose un devoir de diligence raisonnable aux entreprises de s’efforcer d’empêcher ou d’atténuer une incidence négative qui peut être directement liée à leurs activités, à leurs produits ou à leurs services en vertu d’une relation d’affaires, comme les sous-traitants ou les fournisseurs de main-d'œuvre. Cela s'appliquerait à Endeavour par rapport à ALS, comme entrepreneur exploitant le laboratoire de la mine, et par rapport à toute agence de placement de main-d'œuvre tel que SAER-Emploi selon les ententes antérieures. Le devoir de diligence raisonnable ne se limite pas à un examen initial d'une relation d'affaires, mais il devrait aussi s'appliquer de façon proactive par l'application de mesures systémiques afin de cerner les risques liés à la responsabilité sociale de l'entreprise et pour prévenir ou atténuer les répercussions négatives potentielles, de même que par la surveillance continue des relations d'affaires et des opérations connexes. Un exemple de mesures de diligence raisonnable avec des sous-traitants consisterait à faire jouer le poids de l'entreprise afin d'incorporer dans les contrats des attentes à l'égard de la responsabilité sociale de l'entreprise ou de favoriser la formation et le renforcement des capacités. L'entreprise pourrait trouver utiles les travaux en cours à l'OCDE visant à élaborer un outil concret pour aider les entreprises à mettre en œuvre les exigences énoncées dans les Principes directeurs concernant le devoir de diligence raisonnable.

  • Le chapitre II – Principes généraux, paragraphe 13 (page 23) dit en outre que les entreprises devraient aussi encourager dans la mesure du possible leurs partenaires commerciaux, y compris leurs fournisseurs et leurs sous-traitants, à appliquer des principes de conduite responsable conformes aux Principes directeurs.

36. Le site internet de Santé Canada indique que des preuves suffisantes montrent que des niveaux de plomb dans le sang inférieurs à 5 μg/dl (ou 50 μg/l) sont associés à des effets néfastes pour la santé. Bien qu'il existe de nombreuses sources possibles d'exposition au plomb, y compris des sources non reliées au travail, les entreprises ont la responsabilité d'offrir un milieu de travail sûr et sain et de réduire l'exposition de leurs employés à des substances dangereuses, dont le plomb. Le PCN souligne qu'Endeavour-SEMICO a imposé des normes de dépistage des niveaux de plomb dans le sang et des seuils de ces niveaux au laboratoire de la mine qui sont déjà plus rigoureux que les normes internes générales d'ALS en la matière et qu'elle a pris des mesures pour réaliser une évaluation du risque pour le plomb, ce qui a déclenché de nouvelles activités de formation et des améliorations des normes en milieu de travail à Tabakoto. Le PCN espère que l'entreprise mette fermement en application les normes reconnues internationalement en matière de santé et de sécurité au travail (SST) dans ses opérations, notamment en ce qui concerne la manipulation et la gestion du plomb et d'autres substances dangereuses. Le PCN souligne avec satisfaction l'engagement de l'entreprise à le faire dans le cadre des résultats du dialogue.

37. Pendant les consultations sur l’ébauche de communiqué final, le PCN a pris note de la proposition faite par le déclarant selon laquelle SEMICO financerait des projets communautaires employant des employés licenciés non repris par SEMICO. Le PCN a transmis les commentaires et la proposition du déclarant à l’entreprise et indiqué que puisque le dialogue facilité du PCN était terminé, la nouvelle proposition ne pouvait être prise en compte par le processus du PCN à ce stade. Toutefois, le PCN a invité le déclarant à entamer un dialogue avec l’entreprise au sujet de cette proposition, s’il le souhaitait.

38. Pour conclure, le PCN estime que le processus de dialogue encadré a joué un rôle constructif pour aider les parties à régler des problèmes importants pour les employés. Malgré l'absence d'un règlement mutuellement acceptable, le PCN trouve encourageants les actions et les engagements pris par Endeavour par suite de cette affaire. Le déclarant a remercié le PCN d'avoir encadré le dialogue. Le PCN a confiance que les parties auront trouvé le dialogue utile et il les encourage à continuer de communiquer l'un avec l'autre sur les questions importantes traitées dans ce processus du PCN.

Annexe : Les Principes directeurs de l'OCDE et le processus du PCN

Les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales sont des recommandations que les gouvernements adressent aux entreprises multinationales exerçant des activités dans les pays adhérents ou à partir de ces derniers. Ils énoncent des normes et des principes non contraignants de conduite responsable pour les entreprises (droits humains, emploi, environnement, publication d'information, corruption…) dans un contexte mondial, en phase avec les lois applicables et les normes reconnues à l'échelle internationale.

Les points de contact nationaux (PCN) sont un mécanisme volontaire et non judiciaire de facilitation du dialogue. Établis en vertu de l'adhésion des pays à la Déclaration sur l'investissement de l'OCDE, leur mandat est le suivant : (a) promouvoir l'adoption des Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales sur la conduite responsable par les entreprises, qui les guident dans leurs opérations de tous les jours, et (b) faciliter le dialogue entre les entreprises et les parties touchées, quand des questions relatives aux opérations d'une entreprise s'inscrivent dans le cadre des principes directeurs. La démarche que doit suivre le PCN canadien pour résoudre les questions soulevées par la mise en œuvre des Principes directeurs dans des circonstances spécifiques est décrite dans les Lignes directrices de procédure des Principes directeurs de l’OCDE (section C, page 81 de l’édition de 2011) et expliquée en plus grands détails dans le Guide de procédure du PCN du Canada.

Par suite de la réception d'une demande d'examen, le PCN fait une évaluation initiale pour examiner les enjeux soulevés. Au cours de ce processus, afin de déterminer s'il peut offrir de bons offices aux parties, le PCN tient compte des facteurs énoncés au paragraphe 25, page 94 de l’édition de 2011 des Principes directeurs.

Si le PCN établit qu'un dialogue encadré pourrait éventuellement résoudre les questions soulevées, il peut offrir à l'entreprise et à ceux qui font la plainte de participer à un dialogue encadré ou à une médiation sur une base volontaire et de bonne foi. Un dialogue encadré vise à ce que les parties obtiennent une meilleure compréhension des enjeux et identifient des débouchés ou des solutions aux enjeux identifiés dans la soumission au PCN. Le PCN canadien n'est pas obligé par l'OCDE de rendre une décision sur la « non-conformité » éventuelle aux principes directeurs, mais il peut le faire, à son unique et entière discrétion. Ce n'est pas le rôle du PCN canadien de fournir la réparation du problème. Le PCN offre un forum neutre pour un dialogue encadré ou une médiation, pour que les parties trouvent ensemble des solutions, s'il y a une raison de croire qu'un tel dialogue peut aider à trouver des solutions mutuellement acceptables, tout en faisant progresser la mise en œuvre par les entreprises multinationales des principes directeurs de l'OCDE.

Que le PCN offre ou non ses bons offices aux parties, et que les parties parviennent à s'entendre ou non, la procédure exige que le PCN rende publics les résultats des procédures par la publication d'un communiqué final sur son site internet.