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Où est le Canada? Parmi les chefs de file qui fournissent de l’énergie et luttent contre les changements climatiques

Discours d’ouverture prononcé à l’occasion de la réunion d’experts intitulée « Assurer l’avenir énergétique de l’Europe : Canada, où êtes-vous? » de la Conférence de Riga de 2022

Le 20 octobre 2022 - Riga (Lettonie)

Stéphane Dion - Envoyé spécial auprès de l’Union européenne et de l’Europe et ambassadeur du Canada en France

Tout le monde sait où se trouve le Canada. Ce que l’on sait peut-être un peu moins, c’est à quel point le Canada fait partie des chefs de file lorsqu’il s’agit d’assurer un approvisionnement énergétique fiable et de lutter contre les changements climatiques.

Pendant longtemps, le Canada a été un important producteur de ressources énergétiques conventionnelles. Il s’est positionné comme un acteur clé de la transition vers une économie à faibles émissions. Ainsi, le Canada s’impose plus que jamais comme un partenaire de choix pour l’Europe, et l’Europe a tout intérêt à conclure des contrats à long terme et à investir massivement au Canada. Je vais aborder brièvement chacun de ces points, un par un.

Le Canada se classe au 3e rang des exportateurs de pétrole brut et au 6e rang des exportateurs de gaz naturel, de charbon et d’uranium sur la planète. La plupart de ces exportations sont destinées aux États-Unis, qui comptent pour 80 % des exportations d’énergie, en terme de valeur monétaire. Néanmoins, nous exportons des produits énergétiques vers 142 pays, et nos exportations vers les États-Unis leur permettent d’augmenter leurs propres exportations. Et la capacité du Canada à produire de l’énergie ne cesse de croître. En 2019, le Canada a produit 33 % d’énergie primaire de plus qu’en 2005, alors que le monde, en moyenne, a augmenté sa production d’énergie de 28 % au cours de la même période.

En 2021, il y avait 97 projets énergétiques en construction au Canada et 305 projets énergétiques prévus. Les projets du secteur pétrolier et gazier continuent de représenter la plus grande partie de la valeur des projets, bien que les projets de technologie propre se concrétisent également en grand nombreNote de bas de page 1.

Le Canada peut fournir des ressources essentielles à la transition énergétique vers une économie à faibles émissions. Ses réserves de minéraux critiques contiennent 31 minéraux et métaux considérés comme essentiels à cette transition. Le Canada est déjà un fournisseur important et fiable pour les marchés avides de minéraux, y compris les marchés européens. Il est une destination de choix pour les investissements dans les chaînes de valeur minières et le financement minier international : 43 % des sociétés minières publiques du monde sont inscrites à la Bourse de Toronto (TSX) et à la Bourse de croissance TSX (TSX-V). Le Canada offre des possibilités inégalées de produire de manière fiable des minéraux et des métaux utilisés dans les véhicules électriques, la production d’énergie renouvelable, les batteries de haute qualité, les applications de technologies propres et les chaînes d’approvisionnement de fabrication de pointe.

Le Canada est notamment l’un des quatre plus grands producteurs mondiaux d’éléments du groupe du platine (EGP) utilisés dans les catalyseurs automobiles et dans la production d’hydrogène et les piles à combustible, ainsi que le deuxième producteur de nickel raffiné le moins cher dans le monde, en raison de la coproduction de cuivre, de cobalt, d’or et d’EGP. Le Canada possède certaines des plus grandes ressources connues de terres rares. Il a tout ce qu’il faut pour devenir une plaque tournante du raffinage du nickel et du cobalt recommandés pour les batteries. Il possède certains des gisements de roche dure les plus purs qui devraient produire de l’hydroxyde de lithium d’excellente qualité pour les batteries. Le Canada est le plus grand exportateur mondial de potasse, engrais de culture essentielNote de bas de page 2. Je pourrais continuer encore et encore.

Le Canada est donc un grand producteur d’énergie et de ressources essentielles. Mais le gouvernement du Canada est bien conscient que notre pays doit en faire plus, car le monde en demande toujours plus, y compris l’Europe, où les prix de l’énergie et surtout de l’électricité ont augmenté de façon spectaculaire, même avant la guerre menée par Poutine.

En particulier à cause de la guerre injustifiable que Poutine poursuit contre l’Ukraine, les États démocratiques européens cherchent éliminer leur dépendance énergétique vis-à-vis de la Russie, mais aussi de leur dépendance vis-à-vis des minéraux critiques de la Chine. D’où le réel intérêt que suscite la coopération sur ce front avec une démocratie stable et alliée comme le Canada, dont la technologie et la R-D sont des points forts, et qui dispose d’une main-d’œuvre qualifiée et d’abondantes ressources naturelles cruciales. Ce regain d’intérêt pour notre pays est bien résumé dans la déclaration suivante que le chancelier allemand Olaf Scholz a faite le 22 août à Montréal : « Le Canada possède autant de matières premières que la Russie, mais la différence est qu’il est une démocratie fiable. Par conséquent, un grand nombre de nouveaux domaines de coopération peuvent s’ouvrir entre nous, car nous partageons non seulement des valeurs communes, mais aussi une vision similaire du monde. » [traduction]

La guerre de Poutine a rendu la transition vers une économie carboneutre encore plus difficile à atteindre. En effet, maintenant que l’Europe doit se sevrer rapidement du gaz russe, plusieurs pays reviennent au charbon, qui émet deux fois plus de GES que le gaz. Une hausse similaire du recours au charbon se produit dans le monde entier en raison des pénuries de gaz et des prix élevés.

L’Europe réfléchit de manière plus stratégique à ses vulnérabilités économiques et à la manière d’y faire face. Elle est à la recherche d’une politique adaptée à un monde où les liens de dépendance économique avec des pays non démocratiques, autrefois essentiellement perçus comme un moyen de rapprochement et de dialogue, sont désormais davantage considérés comme un facteur déterminant de risque. Une réorientation est en cours, dont l’objectif est de s’adapter à un monde où la sécurité des approvisionnements, notamment en énergie et en matières premières, n’est plus uniquement déterminée par les lois classiques de l’offre et de la demande, mais doit s’inscrire dans un contexte incluant des considérations géopolitiques et environnementales.

Plus précisément, les Européens font trois demandes au Canada :

Le besoin énergétique le plus pressant pour l’Europe est l’approvisionnement en gaz naturel. Tant que le gaz russe bon marché était une option viable, la demande de GNL en provenance d’Amérique du Nord était moindre en Europe. Il était alors plus difficile pour les entreprises privées canadiennes d’être concurrentielles. Avant que la reprise économique à la suite de la pandémie et la guerre de Poutine ne fassent monter en flèche la demande de GNL, l’offre excédentaire mondiale de gaz naturel et les faibles prix du GNL en Europe faisaient en sorte que les entreprises pouvaient difficilement juger rentable d’investir afin de construire l’infrastructure nécessaire au Canada pour exporter vers l’Europe. Et notre gaz n’intéressait pas autant l’Europe. Devant le nouvel intérêt marqué de l’Europe pour l’importation de GNL canadien et, à terme, d’hydrogène, des projets comme Goldboro LNG (Nouvelle-Écosse, Pieridae Energy) et Saint John LNG (Nouveau-Brunswick, Repsol) trouvent un second souffle.

Le gouvernement du Canada travaille avec les gouvernements infranationaux et les partenaires de l’industrie pour évaluer la viabilité du développement d’une capacité de GNL à faibles émissions de GES sur la côte Est du Canada, qui pourrait déboucher sur des exportations vers l’Europe sur un horizon de trois à cinq ans mais, pour cela, les Européens devront garantir des contrats à long terme, d’une vingtaine d’années, vu le très gros volume d’investissement requis. Comme les pays européens et le Canada ont l’intention d’être carboneutres d’ici 2050 (2045 pour l’Allemagne), les deux parties demandent qu’au cours de ces années, les fournisseurs aient un plan en place pour passer à l’hydrogène propre sans émission, en fonction de la demande du marché.

Le Canada dispose de matières premières abondantes et diversifiées pour produire de l’hydrogène propre, d’entreprises technologiques d’avant-garde (p. ex., piles à hydrogène) et d’une quinzaine de projets de production à divers stades d’avancement pour accroître la production d’hydrogène. Et nous venons de conclure une alliance avec l’Allemagne pour commencer à exporter vers ce pays, en 2025, de l’hydrogène produit au moyen de l’énergie éolienne à Terre-Neuve-et-Labrador. Nous pouvons augmenter immédiatement nos exportations de technologies qui produisent et utilisent l’hydrogène, mais des investissements seront nécessaires pour étendre l’infrastructure de production d’hydrogène en vue de répondre aux besoins énergétiques de l’Europe à moyen et à long terme.

Des contrats à long terme et d’importants investissements européens au Canada sont donc hautement souhaitables pour atteindre nos objectifs communs en matière d’énergie et de climat. Les investisseurs européens trouveront au Canada non seulement les ressources essentielles tant recherchées, mais aussi un producteur d’énergie fiable et responsable, doté d’un cadre fondé sur des règles, et un formidable environnement d’investissement. En effet, le Canada offre :

En somme, le Canada est ici, en tant que partenaire essentiel de l’Europe, et il fait partie de la solution aux défis énergétiques et climatiques mondiaux.

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