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Déclaration sur le renforcement de l’action anticipée dans l’aide humanitaire

  1. Contexte

    1. Les besoins humanitaires atteignent un niveau record. Les crises et les conflits, les impacts des changements climatiques et les catastrophes menacent de plus en plus la vie et les moyens de subsistance de millions de personnes – des tendances exacerbées par les impacts de la COVID-19 et de la guerre d’agression injustifiable, non provoquée et illégale de la Russie contre l’Ukraine. Pour que le système humanitaire puisse continuer à protéger les populations touchées, combler le déficit de financement croissant et protéger les acquis durement gagnés en matière de développement, un changement de paradigme vers une aide humanitaire plus efficiente, efficace et prospective est nécessaire.
    2. Sur la base des engagements pris dans le cadre du Pacte du G7 pour la prévention de la famine et des crises humanitaires, adopté par le G7 à Londres, et de l’événement de haut niveau sur l’action anticipée qui s’est tenu à New York en 2021, et sur la base de notre compréhension commune de l’importance cruciale de prévenir et d’atténuer les souffrances humaines et de réduire les besoins avant qu’ils ne se produisent, nous, le G7, nous engageons à rendre le système humanitaire aussi anticipatif que possible.
    3. Nous reconnaissons les efforts considérables déployés pour faire face à l’impact croissant des changements climatiques et nous nous efforcerons d’assurer une uniformité et des synergies maximales entre l’aide humanitaire et l’action climatique, comme convenu dans l’Accord de Paris, y compris par la contribution essentielle de l’action anticipée pour éviter, minimiser et traiter le risque de pertes et de dommages associés aux impacts des changements climatiques. Nous cherchons à maximiser les synergies avec les travaux sur le risque climatique dans le cadre du volet développement du G7. En outre, nous saluons et soutenons l’objectif du Secrétaire général des Nations Unies de faire en sorte que, dans les cinq prochaines années, chaque habitant de la planète soit protégé par des systèmes d’alerte précoce contre les phénomènes météorologiques et les changements climatiques de plus en plus extrêmes. Nous reconnaissons l’importance de l’initiative Systèmes d’alerte précoce aux risques climatiques (CREWS) pour atteindre cet objectif. Nous attendons avec impatience de voir le plan d’action qui sera préparé par l’Organisation météorologique mondiale lors de la COP27 en Égypte.
    4. Nous notons avec une profonde inquiétude le problème croissant de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde, encore aggravé par la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine. Dans un présent où le risque de famine reste une menace réelle, il est impératif de jeter les bases de l’adoption et de l’intensification des mécanismes d’anticipation afin de faciliter une action précoce et de prévenir le pire. Nous reconnaissons les efforts complémentaires importants du groupe de travail G7 sur la sécurité alimentaire.
  2. Notre compréhension commune du potentiel de l’action anticipée

    1. L’action anticipée est définie comme l’action en amont des dangers prévus pour prévenir ou réduire les impacts humanitaires aigus avant qu’ils ne se produisent pleinement. Cela nécessite des plans préétablis qui désignent les partenaires et les activités, des renseignements d’alerte précoce fiables et un financement préétabli, débloqué de manière prévisible et rapide lorsqu’un point de déclenchement convenu est atteint.
    2. Nous nous engageons à maximiser le potentiel de l’action anticipée pour faciliter la planification conjointe et une action plus rapide, en améliorant la collaboration également au-delà du système humanitaire. Il s’agit notamment de tirer parti des efforts déployés, entre autres, en matière d’adaptation aux changements climatiques, de réduction des risques de catastrophe, d’alerte précoce, de préparation, de protection sociale, de financement des risques de catastrophe et du climat, de renforcement des capacités et de participation à tous les niveaux – local, national, régional et international. Pour ralentir la croissance des besoins humanitaires, il convient d’établir des liens importants avec les progrès réalisés dans le cadre du Cadre de Sendai pour l’atténuation des risques de catastrophes, le financement du climat et le flux de travail du G7 sur le financement du climat et des risques de catastrophe, y compris dans les conflits et les crises prolongées, en encourageant l’utilisation d’un financement des risques préétabli dans le cadre d’une action anticipée. Nous nous engageons donc à renforcer l’environnement propice à l’action anticipée et à améliorer la collaboration et le travail par-delà les cloisonnements.
    3. Les pays en proie à des conflits et à des crises prolongées sont parmi les plus vulnérables aux changements climatiques, avec une capacité limitée à absorber les chocs et à développer des structures de gestion des risques de catastrophes pour permettre une action anticipée. Notre engagement commun à renforcer l’approche de l’action anticipée doit impliquer des efforts pour l’appliquer de plus en plus dans les situations de crise et de conflit prolongés où les chocs naturels et liés aux changements climatiques exacerbent les besoins liés aux conflits. Bien que nos engagements se concentrent actuellement sur les chocs naturels et climatiques, nous devons continuer à améliorer notre compréhension du rôle que l’action anticipée peut jouer dans l’atténuation de l’impact humanitaire d’autres chocs, notamment parce que la majorité des besoins humanitaires résultent de risques d’origine humaine tels que les conflits et la violence.   
    4. Il est important de disposer de structures et de systèmes de gestion des risques climatiques et de catastrophes bien établis et fonctionnels pour mener une action anticipée efficace. Dans les contextes humanitaires où ces systèmes ne sont pas pleinement fonctionnels, des efforts internationaux seront nécessaires pour renforcer les capacités et compléter les efforts existants afin que l’action anticipée puisse évoluer. Nous soulignons donc la nécessité de continuer à soutenir la mise en place et le renforcement des structures et des systèmes nationaux, régionaux et locaux de gestion des catastrophes et des risques climatiques là où ils sont faibles, afin de soutenir l’intensification de l’action anticipée dans ces situations.
  3. Intensifier et intégrer l’action anticipée dans le système humanitaire

    1. Si l’aide humanitaire traditionnelle reste essentielle en cas de conflit et de catastrophe, les approches anticipées nous permettent d’agir avant que la catastrophe ne se produise et que la crise ne se déploie pleinement, avant que des vies et des moyens de subsistance ne soient perdus. Nous, le G7, réaffirmons donc notre engagement à plaider en faveur de l’action anticipée, à l’intensifier et à l’intégrer systématiquement dans le système humanitaire, en particulier pour les pays disposant d’une infrastructure bien établie de réduction des risques de catastrophe.
    2. Nous nous engageons à soutenir l’intégration de l’action anticipée dans le cycle du programme humanitaire ainsi que dans la planification du développement et les plans d’adaptation nationaux, afin de développer et de renforcer les structures, les systèmes et les capacités qui permettent une action et une construction précoces dans les zones à haut risque de catastrophe. À cet égard, nous saluons également les recommandations importantes et la liste de contrôle du Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophes sur la mise à l’échelle de la réduction des risques de catastrophe dans l’action humanitaire 2.0.
    3. Nous nous engageons à soutenir, à renforcer et à accroître la disponibilité de données prévisionnelles de qualité sur les risques, y compris les dangers et les besoins prévus, afin d’améliorer les systèmes d’alerte précoce et l’analyse des risques. Il s’agit notamment de concevoir et de développer conjointement des analyses de risques, des seuils, des déclencheurs et des modèles innovants pour l’anticipation, ainsi que d’investir dans la coordination et les infrastructures pour permettre le partage des données et des modèles afin de multiplier les connaissances, les preuves et les expériences en matière d’action anticipée. Nous nous engageons à soutenir cette démarche, notamment par l’entremise du Complex Risk Analytics Fund (Fonds d’analyse des risques complexes des Nations Unies) et de l’indice pour la gestion des risques (INFORM).
    4. Les faits montrent le rôle crucial des acteurs locaux pour une mise en œuvre réussie de l’action anticipée. Ils sont les mieux placés pour comprendre les vulnérabilités, les besoins, les capacités et les obstacles à la participation au niveau local, ce qui permet une réponse inclusive. Agir en amont des crises permet de renforcer les possibilités d’action au niveau local. Nous nous engageons à aider les communautés locales, la société civile et les autorités des pays concernés à jouer un rôle de premier plan dans l’analyse et la gestion des risques liés au climat et aux catastrophes, la collecte de données, la préparation et la programmation.
    5. Nous nous engageons à inclure et à faire participer les communautés, groupes et personnes marginalisés et vulnérables à l’action anticipée et à leur donner les moyens d’agir. Nous reconnaissons que le sexe, l’âge, les capacités, l’identité ethnique et religieuse, le statut de personne déplacée et l’identité sexuelle se superposent aux obstacles sociaux, culturels et économiques à l’inclusion dans l’action anticipée. Nous pensons qu’une action anticipée forte est une action qui reconnaît toutes les personnes comme des agents de changement, et qui atténue les risques de violence, de discrimination et d’inégalités fondées sur le sexe.
    6. L’apprentissage collectif, la coordination et les partenariats sont la base de la conduite du programme d’action anticipée, y compris la poursuite de l’élaboration et de la diffusion d’une solide base de données probantes à tous les niveaux. Nous nous engageons à soutenir cette démarche, notamment par l’entremise d’initiatives telles que le Anticipation Hub (carrefour d’action anticipée), le Partenariat pour une action précoce fondée sur le risque (REAP) et le Réseau mondial contre les crises alimentaires.
  4. Augmenter les ressources financières pour l’action anticipée

    1. Des fonds doivent être mis à disposition à plus grande échelle et de manière flexible et prévisible afin de mettre en place et d’alimenter des actions anticipées le cas échéant, en veillant à ce que les acteurs et les protocoles soient en place pour permettre la mise en œuvre de mesures anticipées lorsqu’elles sont déclenchées.
    2. Nous, les principaux donateurs du système humanitaire, nous efforçons d’augmenter de manière significative notre soutien financier aux programmes d’action anticipée. Il s’agit notamment de prépositionner des fonds, entre autres, au sein des organisations humanitaires, dans des fonds communs et des instruments de financement pertinents. Conscients de leurs vulnérabilités et défis particuliers, nous concentrerons nos efforts sur les crises prolongées et les situations de conflit.
    3. Nous utiliserons les instruments de financement existants et rechercherons de nouvelles solutions de financement pour tenir nos engagements, en développant l’action anticipée dans le cadre des fonds existants, en particulier pour les pays disposant d’une infrastructure établie de réduction des risques de catastrophe, mais aussi grâce à de nouvelles solutions de financement. Afin de soutenir la diversité des instruments de financement humanitaire, nous cherchons à accroître le soutien aux instruments existants, tels que les fonds communs comme le Fonds central d’intervention d’urgence (CERF), le Disaster Relief Emergency Fund (DREF) de la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, ainsi que les Start Funds et Start Ready du Start Network. Nous demandons en outre que cette approche soit étendue aux fonds communs nationaux, le cas échéant. Nous étudierons également la manière dont le financement des risques de catastrophe peut être rendu plus anticipatif, en utilisant les prévisions pour déclencher les paiements plutôt qu’en libérant les fonds des réserves de risques sur la base des impacts modélisés.
    4. Nous mettrons l’accent sur les instruments financiers qui s’adressent au leadership, aux communautés et aux systèmes locaux en matière d’action anticipée, afin que les programmes d’action anticipée soient informés par le contexte, les connaissances et les évaluations des risques au niveau local, qu’ils soient intégrés dans les structures locales et qu’ils continuent à renforcer les capacités des communautés locales et des systèmes nationaux.
    5. Dans un esprit de responsabilité et de transparence, nous nous efforçons de développer des moyens pour mieux suivre et rendre compte de notre financement humanitaire de l’action anticipée. À cette fin, nous nous engageons à développer une méthodologie qui améliore notre compréhension du montant des fonds alloués à l’action anticipée et des possibilités de les augmenter. Cet engagement s’appuie sur les efforts entrepris par le groupe d’experts du G7 sur la prévention de la famine et les crises humanitaires et peut s’inspirer des travaux du Centre pour la protection contre les catastrophes. À l’aide d’une méthodologie commune, nous cherchons à établir une base de référence de notre financement individuel et à rendre compte ensuite de notre soutien financier à l’action anticipée dans le futur.
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