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Évaluation environnementale finale de l’Accord Canada‒États-Unis‒Mexique (ACEUM)

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Le 16 juillet 2020
Préparé par le gouvernement du Canada

Table des matières

Résumé

Le 30 novembre 2018, le Canada, les États-Unis et le Mexique ont signé un protocole visant à moderniser l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Au Canada, le nouvel accord est appelé l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) Footnote1 . Par la suite, le 10 décembre 2019, les parties ont signé un protocole d’amendement visant à modifier certains éléments du nouvel accord relatifs au règlement des différends entre États, au travail, à l’environnement, à la propriété intellectuelle et aux règles d’origine. Le résultat final obtenu dans l’ACEUM préserve des éléments clés de l’ALENA, modernise certaines disciplines pour aborder des enjeux commerciaux modernes, réduit les formalités à la frontière et procure plus de prévisibilité et de stabilité aux travailleurs et aux entreprises dans le marché nord-américain intégré. Dans l’ensemble, la modernisation de l’ALENA marque un important jalon dans la relation économique du Canada avec les États-Unis et le Mexique.

L’entrée en vigueur de l’ALENA en 1994 a créé la plus grande zone de libre-échange dans le monde. En venant renforcer les règles et les procédures qui régissent le commerce et l’investissement en Amérique du Nord, l’Accord a jeté de solides bases pour assurer la prospérité du Canada et a donné au reste du monde un bel exemple des avantages de la libéralisation des échanges. Depuis 1994, l’ALENA a contribué à la croissance économique et au relèvement du niveau de vie de la population des trois pays membres. En particulier, l’ALENA a favorisé le développement d’un marché nord-américain intégré et concurrentiel en procurant aux fabricants, aux producteurs, aux investisseurs et aux consommateurs un environnement commercial prévisible et sûr.

D’un point de vue trilatéral, l’ALENA a contribué à une hausse sans précédent des flux commerciaux en Amérique du Nord depuis sa mise en œuvre. De 1993 à 2018, le commerce total de marchandises entre le Canada et les États-Unis a triplé, et il a presque décuplé entre le Canada et le Mexique. Dans l’ensemble, le commerce trilatéral total de marchandises (le total des importations mutuelles entre les trois pays partenaires) a augmenté pour atteindre près de 1,2 billion de dollars américains en 2018.

L’environnement : de l’ALENA à l’ACEUM

L’ALENA a été le premier accord de libre-échange de l’histoire à établir un lien entre l’environnement et le commerce, ce qui a été fait au moyen d’un accord additionnel, l’Accord nord-américain de coopération dans le domaine de l’environnement (ANACDE). Dans le cadre de l’ANACDE et de la Commission de coopération environnementale (CCE) créée par cet accord, le Canada, les États-Unis et le Mexique ont travaillé ensemble pour surveiller et aborder de manière efficace les enjeux environnementaux émergents et complexes, y compris les changements climatiques.

Pour évaluer les répercussions de l’ACEUM sur l’environnement, il est important de considérer que l’ACEUM reprend généralement les principales dispositions de l’ALENA, y compris l’accès au marché pratiquement exempt de droits de douane, de sorte que le passage au nouvel Accord ne devrait pas entraîner de changements importants à l’égard des principaux facteurs environnementaux qui se rattachent au commerce nord-américain. À cet égard, un examen des nombreuses études et recherches sur les répercussions environnementales de l’ALENA depuis son entrée en vigueur, y compris celles menées par la CCE, fournit un ensemble complet d’observations réelles a posteriori pour l’évaluation de l’ACEUM. Malgré les différents effets sur l’environnement associés à l’entrée en vigueur de l’ALENA qui sont mis en lumière dans des études et des recherches, il a été très difficile, dans l’ensemble, d’évaluer si l’effet global de l’accord sur l’environnement a été positif ou négatif. Cela dit, plusieurs études Footnote2 soulignent que le cadre de coopération environnementale créé dans l’ANACDE a contribué pour beaucoup à améliorer la protection de l’environnement dans la région après l’entrée en vigueur de l’ALENA. On considère que l’ANACDE a eu un effet positif net sur l’environnement du fait qu’il a amené les partenaires de l’ALENA à travailler ensemble sur les questions environnementales.

Évaluation environnementale de l’ACEUM

Avec la renégociation de l’ALENA, le Canada, les États-Unis et le Mexique ont saisi l’occasion de renforcer et de moderniser les dispositions sur l’environnement qui figuraient dans l’ANACDE, de les intégrer dans l’Accord, et d’établir un nouveau chapitre sur l’environnement complet et exécutoire. Le résultat final de l’ACEUM comprend un nouvel accord parallèle de coopération dans le domaine de l’environnement (ACE) qui garantit le maintien et la modernisation de la CCE et de son secrétariat situé à Montréal, des institutions uniques établies dans le cadre de l'ALENA en 1994. Ces institutions continueront à surveiller et à aborder efficacement les effets du commerce sur l’environnement, et à promouvoir la coopération avec les partenaires nord-américains pour atteindre l’objectif du développement durable dans la région. Divers chapitres et lettres d’accompagnement de l’ACEUM contiennent également plusieurs dispositions portant expressément sur l’environnement, qui ont une incidence sur le commerce des biens et des services, l’investissement, le règlement des différends, la propriété intellectuelle, ainsi que le commerce et les peuples autochtones. Par ailleurs, étant conscient qu’il serait difficile de rallier un soutien trilatéral en faveur des obligations en matière de changements climatiques, le Canada a veillé à ce que l’Accord reflète l’importance qu’il accorde aux changements climatiques, notamment en obtenant la garantie que les parties pourront coopérer pour promouvoir des stratégies et des mesures comme l’utilisation de sources d’énergie renouvelables et de remplacement, ainsi que de technologies à faibles émissions, qui jouent un rôle important dans la lutte contre les changements climatiques.

Dans l’ensemble, l’ACEUM préserve des éléments clés de l’ALENA, modernise des règles pour résoudre des questions propres au commerce d’aujourd’hui, réduit les formalités à la frontière et procure plus de prévisibilité et de stabilité aux travailleurs et aux entreprises dans l’ensemble du marché nord-américain intégré. Les gains liés à ces nouvelles dispositions, tels que l’efficacité des transports, les procédures sans papier et le commerce de services et de technologies durables en matière d’environnement, peuvent renforcer l’effet positif que l’ACEUM aura sur l’environnement par rapport à l’ALENA original.

À la lumière des études d’impact environnemental réalisées au sujet de l’ALENA, ainsi que de l’évaluation qualitative, chapitre par chapitre, des dispositions relatives à l’environnement prévues dans l’ACEUM, le présent rapport arrive à la conclusion que l’ACEUM aura des effets plus positifs sur l’environnement que l’ALENA, car le nouvel Accord devrait renforcer la protection de l’environnement et les pratiques de gouvernance dans ce domaine en Amérique du Nord.

I. Introduction

L’évaluation environnementale finale de l’ACEUM a pour objectif de résumer les risques pour l’environnement qui sont susceptibles de découler de l’Accord et de mettre en évidence les dispositions précises qu’il contient qui pourraient avoir des incidences sur l’environnement Footnote3 .

Après la présentation d’un aperçu du processus d’évaluation environnementale du gouvernement du Canada pour les accords de libre-échange, le présent document fournit un survol des principaux effets environnementaux de l’ALENA depuis sa mise en œuvre en 1994 et un résumé des principaux domaines de préoccupations environnementales soulevées par les parties prenantes au cours des négociations de l’ACEUM. Le document présente les chapitres et les dispositions pertinents de l’ACEUM, et met en évidence leurs effets attendus sur la coopération et la gouvernance dans le domaine de l’environnement. Enfin, le document donne une vue d’ensemble des lois, des règlements et des mesures en vigueur qui s’attaquent aux problèmes environnementaux au Canada.

II. Le processus d’évaluation environnementale

Le Canada est déterminé à veiller à ce que le commerce aille de pair avec la protection et la préservation de l’environnement. Un élément important à cet égard est la réalisation d’évaluations environnementales au sujet des négociations commerciales, évaluations qui visent à intégrer pleinement les considérations environnementales dans le processus de négociation, à contribuer à la prise de décisions éclairées et à améliorer la cohérence globale des politiques.

La section A ci-dessous donne un aperçu du cadre général pour la conduite des évaluations environnementales des négociations commerciales, tandis que la section B résume les principales conclusions de l’évaluation environnementale initiale qui a été réalisée au début des négociations visant à moderniser l’ALENA.

A. Cadre pour l’évaluation environnementale des négociations commerciales

Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, tous les ministères et organismes du gouvernement du Canada sont tenus de prendre en compte, le cas échéant, les effets potentiels sur l’environnement au cours de l’élaboration de politiques, de plans et de programmes. La directive prévoit notamment l’obligation de réaliser une évaluation environnementale stratégique d’un projet de politique, de plan ou de programme si le projet est soumis à l’approbation d’un ministre ou du Cabinet et si la mise en œuvre du projet peut entraîner des effets importants sur l’environnement, qu’ils soient positifs ou négatifs.

Le processus d’évaluation environnementale vise à analyser les effets sur l’environnement possibles d’un projet d’accord de libre-échange en explorant les liens entre l’environnement et la libéralisation du commerce. Ce faisant, on prend en compte les effets des nouveaux courants d’échanges et d’investissement qui pourraient résulter directement d’un tel accord, ainsi que les répercussions connexes possibles sur l’environnement. Plus précisément, le processus d’évaluation environnementale pour une négociation commerciale a pour objectifs :

Le processus suivi par Affaires mondiales Canada pour l’évaluation environnementale des négociations commerciales comporte trois phases, détaillées dans le Cadre pour l’évaluation environnementale des négociations commerciales élaboré par le Ministère en réponse à la directive, comme énumérées ci-dessous :

Ce document constitue l’EE finale de l’ACEUM. Étant donné que l’ALENA est en vigueur depuis plus de 25 ans et que, à bien des égards, l’ACEUM reprend les principaux avantages de l’accord original sur le plan de l’élimination des droits de douane, le présent rapport se concentre sur une évaluation environnementale qualitative des résultats de l’ACEUM. Pour obtenir une vue d’ensemble de l’incidence économique de l’ACEUM, veuillez consulter le document L’Accord Canada‒États-Unis‒Mexique : analyse des répercussions économiques Footnote5 .

B. Aperçu de l’évaluation environnementale initiale sur la modernisation de l’ALENA

L’évaluation environnementale initiale des négociations visant à moderniser l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) entre le Canada, les États-Unis et le Mexique a été réalisée afin de déterminer si des effets importants étaient susceptibles de se produire sur l’environnement en raison des nouvelles règles qui viendraient régir le commerce et l’investissement dans le cadre d’un ALENA modernisé. Ce rapport a été publié le 12 décembre 2018 Footnote6 . Les parties intéressées, y compris les organisations environnementales et les particuliers, ont été invitées à soumettre leurs points de vue pour qu’ils soient pris en compte dans la rédaction de l’EE initiale. Les commentaires reçus portaient sur un large éventail de sujets, notamment l’eau, le règlement des différends entre investisseurs et États, et l’environnement, et ont alimenté l’analyse des effets potentiels d’un nouvel ALENA sur l’environnement au Canada. Les contributions des parties intéressées se sont poursuivies depuis la publication de l’EE initiale et sont résumées à la partie IV du présent rapport.

Sur la base d’une évaluation qualitative des effets environnementaux possibles de la modernisation de l’ALENA, l’EE initiale a conclu qu’un accord révisé pourrait avoir des effets positifs sur l’environnement grâce à des dispositions renforcées sur la protection et la gouvernance dans le domaine de l’environnement. L’EE initiale a fait ressortir que la promotion d’un environnement sans papier par l’utilisation de processus électroniques pour les douanes, les marchés publics et les procédures relatives aux règles d’origine, pourrait contribuer à réduire la durée de détention des marchandises sous contrôle douanier (en particulier les produits à faible risque) et à améliorer l’efficacité du transport, ce qui contribuerait à limiter le plus possible les effets sur l’environnement liés à la circulation transfrontalière des marchandises.

Le rapport a également indiqué que le chapitre sur l’environnement et celui sur les bonnes pratiques de réglementation sont susceptibles d’avoir le plus d’effets positifs sur l’environnement. En particulier, l’EE initiale a fait ressortir des possibilités pour le Canada de chercher à négocier des obligations ambitieuses dans le chapitre sur l’environnement, y compris l’engagement par les parties à maintenir des niveaux élevés de protection de l’environnement, à assurer une saine gouvernance en matière d’environnement et à s’abstenir d’abaisser les normes pour attirer les investissements ou le commerce. En ce qui concerne le chapitre sur les bonnes pratiques de réglementation, l’EE initiale a conclu que les dispositions attendues pourraient renforcer l’intendance de l’environnement dans les pays de l’ALENA, ce qui aurait des effets positifs sur l’environnement.

III. L’ALENA et la coopération trilatérale en matière d’environnement

Cette partie donne un aperçu des effets qu’a eus sur l’environnement la libéralisation du commerce dans le contexte du marché nord-américain intégré depuis les négociations et la mise en œuvre de l’ALENA en 1994. On y fait également un survol de la coopération trilatérale entretenue en vertu de l’Accord nord-américain de coopération dans le domaine de l’environnement (ANACDE), un accord parallèle à l’ALENA qui est entré en vigueur en même temps que celui-ci.

Comme l’ACEUM reprend en grande partie les principales dispositions de l’ALENA, y compris l’accès au marché pratiquement exempt de droits de douane, le passage au nouvel accord ne devrait pas entraîner de changements importants à l'égard des principaux facteurs environnementaux qui se rattachent au commerce nord-américain. À ce sujet, l’examen des nombreuses études et recherches sur les effets sur l’environnement ayant découlé de l’ALENA depuis son entrée en vigueur fournit un ensemble complet d’observations réelles a posteriori pour l’évaluation de l’ACEUM. Cette méthode a donc été choisie au lieu de procéder à une analyse ex ante des effets prévus.

Dans le contexte de l’EE initiale d’un ALENA modernisé, l’examen préliminaire de la littérature existante a révélé que le bilan environnemental de l’ALENA depuis son entrée en vigueur a été équilibré, se traduisant par des résultats positifs et négatifs tant au niveau national que dans toute l’Amérique du Nord. Alors que l’EE initiale se concentrait principalement sur l’analyse et la littérature préparée par des membres de la société civile et des groupes de défense des intérêts, la présente EE finale comprend également l’examen de plusieurs documents universitaires. Au total, près de 30 articles universitaires sur les effets environnementaux de l’ALENA et, plus largement, sur les effets de la libéralisation du commerce sur l’environnement ont été examinés aux fins de cette évaluation (voir la bibliographie à l’annexe A).

Les principales constatations qui suivent sont également fondées sur les multiples analyses a posteriori des effets environnementaux de l’ALENA effectuées par la CCE Footnote7 , une organisation instituée par l’ANACDE pour soutenir la coopération entre les partenaires de l’ALENA sur les questions environnementales d’intérêt continental, notamment les possibilités et les défis environnementaux présentés par le libre-échange à l’échelle du continent.

En examinant les constatations présentées dans ces études et ces articles, il est important de rappeler que, si l’ALENA a contribué à la croissance du commerce en Amérique du Nord, une part considérable des échanges entre le Canada et les États-Unis se fait selon les règles de la nation la plus favorisée (NPF) de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). En fait, environ 40,5 % des exportations canadiennes vers les États-Unis et 66,7 % des exportations américaines vers le Canada entrent en franchise de droits en vertu des règles de l’OMC. Cela signifie qu’une part importante du commerce bilatéral de marchandises, et les effets sur l’environnement qui y sont liés, ne sont pas directement attribuables à l’ALENA.

A. Principales constatations

Dans le contexte d’un débat de longue date sur la relation entre la croissance économique et les gains de bien-être général, un certain nombre d’études ont examiné le lien entre commerce et environnement et les rapports qui existent entre le libre-échange, la croissance des revenus et les indicateurs de qualité de l’environnement Footnote8 . Les discussions sur les possibilités et les défis environnementaux dans le contexte de l’ALENA ont fourni un terrain fertile pour de telles études.

Cependant, un des principaux défis mis en évidence par la littérature a été la difficulté d’isoler les effets de l’Accord aux fins de l’analyse. En raison des limites des données et des effets positifs et négatifs combinés qui ont été relevés, la plupart des auteurs se sont abstenus de faire des déclarations définitives concernant l’incidence globale de l’ALENA sur l’environnement. En gardant cette importante mise en garde à l’esprit, il est toujours utile d’examiner les faits probants décrits dans ces études.

Effets régionaux

Les études examinées montrent qu’il y a eu une incidence négative sur l’environnement au Mexique Footnote9 , bien que ce phénomène puisse s’expliquer par la croissance économique rapide du pays depuis l’entrée en vigueur de l’Accord Footnote10 . Au Canada, des études ont conclu que l’ALENA a contribué à l’augmentation de la pollution atmosphérique, en particulier dans les collectivités proches de la frontière américaine Footnote11 .

Refuges pour pollueurs

Dans la littérature examinée, les chercheurs n’ont pas pu trouver de preuves étayant la théorie selon laquelle les entreprises délocaliseraient leurs activités au Mexique afin de tirer profit de règlements environnementaux perçus comme plus souples Footnote12 . Alors que la littérature indique que l’ALENA n’a généralement pas provoqué la délocalisation d’entreprises entières, les données des États-Unis sur les entreprises montrent que certaines usines de fabrication ont choisi d’importer du Mexique leurs matériaux à forte intensité de pollution, plutôt que de les produire elles-mêmes. Comme les usines pouvaient désormais importer ces matériaux, la demande pour les produire dans d’autres endroits, comme au Mexique, a augmenté.

Intensité de la production

Certains éléments donnent à penser que l’ALENA a accentué l’intensité de l’extraction des ressources et exacerbé les effets de la dégradation environnementale liée à l’agriculture au Mexique Footnote13 . La libéralisation du commerce des produits agricoles qui a découlé de l’Accord a été associée à des conséquences telles que la pollution par l’azote et l’agriculture chimique intensive, la pénurie d’eau et la perte de diversité biologique due à la surpêche Footnote14 .

Pollution atmosphérique et émissions de gaz à effet de serre (GES)

Il existe des éléments contradictoires sur la nature des liens qui existent entre la libéralisation du commerce et les mesures de la pollution atmosphérique et des émissions de GES. Dans une hypothèse connue sous le nom de « courbe environnementale de Kuznets » et invoquée au cours des négociations de l’ALENA dans plusieurs documents influents, Grossman et Krueger ont constaté que certaines émissions polluantes, notamment le dioxyde de soufre, les oxydes d’azote et les particules en suspension, augmentent initialement à mesure que le revenu par habitant augmente dans un pays. Cependant, les trajectoires de la croissance des revenus et des émissions polluantes semblent aller dans des directions opposées : à mesure que les revenus augmentent, les émissions polluantes diminuent Footnote15 . Le moment charnière où la croissance économique et les émissions polluantes se séparent dépend des émissions particulières et des conditions atmosphériques observées. Pour le dioxyde de soufre et les oxydes d’azote, le tournant semble se situer autour de 5 000 $ US de PIB par habitant.

Néanmoins, les recherches ont montré que cette relation mutuellement avantageuse entre libre-échange et croissance économique et les indicateurs de qualité de l’environnement n’est vraie qu’en partie et dépend du type d’indicateurs environnementaux qui sont examinés. Par exemple, des études ont montré que, pour des indicateurs tels que les GES, on n’observe pas le type de tournant qui a été constaté pour le dioxyde de soufre et les oxydes d’azote. Au lieu de cela, il semble y avoir une hausse continue des émissions de GES à mesure que le PIB par habitant continue d’augmenter. D’autres études ont noté qu’à des niveaux de PIB plus élevés, certains indicateurs, tels que le dioxyde de soufre, subissent une augmentation absolue, passant d’une courbe en forme de « U » inversé à une courbe en forme de « N » Footnote16 . Les données montrent également que l’ALENA a pu entraîner un accroissement marginal de la pollution atmosphérique globale causée par le monoxyde de carbone (d’environ 2 %) mesurée pour l’ensemble des États-Unis.

Effets liés au transport Footnote17

L’augmentation du volume des échanges commerciaux ayant découlé de l’ALENA aurait une incidence importante sur l’environnement en raison de l’intensification des activités de transport aérien et maritime liées au commerce de marchandises. Les données montrent qu’il existe un lien solide et direct entre le commerce et l’environnement dans le secteur des transports, en ce qui concerne, d’une part, la pollution atmosphérique accrue dans les zones frontalières du fait du transport de marchandises, et, d’autre part, l’introduction plus fréquente d’espèces exotiques envahissantes, sous l’effet de l’expansion des corridors de transport, en particulier du transport maritime Footnote18 .

La présence accrue de camions a entraîné une congestion importante des routes dans les zones à proximité des postes frontaliers, ce qui a également accru la pollution atmosphérique.

Technologie, investissement et capitaux

Si certaines des études ont relevé l’incidence négative de l’ALENA sur l’environnement, d’autres ont constaté que l’Accord a conduit à des résultats plus bénéfiques pour l’environnement Footnote19 .

Certaines études ont souligné l’effet positif du libre-échange sur l’environnement, notamment grâce à l’échange ouvert de nouvelles technologies et pratiques de gestion des capitaux plus efficaces. Plusieurs études ont également révélé que l’Accord offrait aux entreprises la possibilité d’améliorer leur capacité technologique par des investissements, ce qui a conduit à l’adoption de technologies nouvelles et plus propres et à l’arrimage des objectifs d’investissement avec la performance environnementale, notamment dans la fabrication à grande échelle. Ainsi, des études ont montré que plusieurs industries sont devenues plus propres à la suite de l’Accord.

D’autres études ont également mis en évidence des liens entre le libre-échange de l’électricité et des améliorations marginales de la qualité de l’air, notamment en raison d’un taux de rotation plus rapide des capitaux Footnote20 .

Dans l’ensemble, les études et les recherches ont fait ressortir un certain nombre de répercussions sur l’environnement associées à l’entrée en vigueur de l’ALENA. Il a cependant été très difficile d’établir de manière générale si l’incidence globale de l’Accord sur l’environnement a été positive ou négative. En effet, un élément récurrent dans la littérature a été la difficulté d’isoler les effets de l’ALENA d’autres variables et d’autres politiques qui ont été mises en œuvre en parallèle.

Cela dit, plusieurs études ont souligné que le cadre de coopération environnementale créé en marge de l’ALENA en vertu de l’ANACDE a contribué pour beaucoup à améliorer la protection de l’environnement dans la région après l’entrée en vigueur de l’ALENA Footnote21 . En amenant les partenaires de l’ALENA à collaborer pour promouvoir le développement durable et favoriser la conservation, la protection et l’amélioration de l’environnement nord-américain, l’ANACDE est considéré comme ayant eu un effet positif net sur l’environnement, comme on le décrit plus en détail dans la section suivante.

B. Atténuer les effets de la libéralisation du commerce sur l’environnement : coopération trilatérale en vertu de l’ANACDE

La coopération trilatérale en vertu de l’ANACDE a été officialisée et soutenue par la CCE, qui a servi de cadre neutre pour examiner des enjeux environnementaux émergents et complexes et les stratégies possibles pour y faire face. Créée en réponse aux préoccupations du public concernant les effets des accords commerciaux sur l’environnement, la CCE a fait œuvre de pionnière parmi les institutions internationales en examinant les liens entre l’environnement et le commerce et en faisant la promotion des avantages économiques de saines pratiques environnementales. Une grande partie du succès de la CCE peut être attribuée à sa capacité d’aborder ces questions importantes en mettant à contribution tous les secteurs de la société, y compris l’industrie, les organisations environnementales et les communautés autochtones, et en facilitant l’établissement de consensus entre les experts et les décideurs politiques des trois pays.

Coopération régionale en matière d’environnement

Au fil des ans, la CCE a facilité l’élaboration de programmes, d’approches et d’outils conjoints novateurs, tels que l’outil À l’heure des comptes, une base de données en ligne sur le registre de rejets et de transferts de polluants trinationaux (RRTP); le programme de gestion rationnelle des produits chimiques Footnote22 (GRPC), un programme de gestion des produits chimiques qui a conduit à l’élimination du DDT Footnote23 ; l’Initiative de conservation des oiseaux d’Amérique du Nord (ICOAN) de la CCE, qui a créé un solide réseau de coopération trinationale pour la conservation des oiseaux; et l’Atlas environnemental de l’Amérique du Nord, un outil cartographique interactif pour la recherche, l’analyse et la gestion des problèmes environnementaux dans la région Footnote24 .

Notamment, la CCE a joué un rôle clé pendant plus de 25 ans dans la protection de l’emblématique papillon monarque, en mettant en œuvre des mesures trinationales pour réduire les menaces et promouvoir des activités économiques durables dans les collectivités concernées par la conservation de cette espèce Footnote25 . La CCE a également servi de cadre pour l’échange de connaissances spécialisées et la communication de renseignements clés sur le papillon monarque au public et aux responsables de la faune.

La CCE a également soutenu des projets environnementaux communautaires en Amérique du Nord au moyen du Partenariat nord-américain pour l’action communautaire en environnement (PNAACE), un programme de subventions qui s’adresse aux communautés locales et mal desservies. Ce programme qui favorise un sentiment de responsabilité partagée à l’égard de l’environnement s’est avéré un mécanisme important pour faire participer le public aux travaux de la CCE.

La CCE a contribué à promouvoir des produits durables en matière d’environnement et des chaînes d’approvisionnement écologiques, des secteurs du transport et du bâtiment durables, les sources d’énergie renouvelables et l’efficacité énergétique, ainsi que les mécanismes de marché en Amérique du Nord. Elle a non seulement aidé des petites entreprises comme des producteurs de café dans l’élaboration de critères écologiques pour la culture du café cultivé à l’ombre, mais elle s’est également associée au secteur privé (neuf grandes entreprises nord-américaines) pour accélérer l’adoption de normes internationales de rendement énergétique afin de réduire la consommation d’énergie. En formant le personnel de grandes entreprises, comme 3M et Arcelor Mittal, elle a amélioré la gestion des systèmes énergétiques dans l’industrie manufacturière. La CCE a également contribué à la création d’une coalition autonome de fournisseurs et de constructeurs automobiles dans la région, qui vise à améliorer le rendement économique et les performances environnementales de la chaîne d’approvisionnement de l’industrie automobile nord-américaine.

En outre, le gouvernement du Canada a signé un accord intergouvernemental canadien concernant l’ANACDE avec l'Alberta, le Manitoba et le Québec, permettant ainsi d’offrir à ces provinces la possibilité de participer aux réunions, aux programmes et aux rapports de la CCE, et ultimement de contribuer à la coopération environnementale régionale en Amérique du Nord.

Renforcer la protection de l’environnement et l’application des normes environnementales

Lors de la signature de l’ANACDE, les trois pays ont défini l’amélioration des lois et des normes environnementales comme un objectif clé de leur partenariat dans le domaine de l’environnement Footnote26 . À cet égard, les évaluations menées par la CCE ont conduit à plusieurs améliorations dans la protection de l’environnement et l’application des lois en la matière dans toute la région. Par exemple, un rapport indépendant du Secrétariat sur le commerce et le recyclage des batteries d’accumulateurs au plomb usées (2013) a entraîné des changements législatifs au Mexique concernant la pollution atmosphérique due à la fonte de plomb de seconde fusion, et a renforcé la détermination de l’Agence de protection de l’environnement des États-Unis à revoir les règlements d’importation et d’exportation relatifs aux batteries d’accumulateurs au plomb usées Footnote27 .

Outre l’élimination de l’utilisation du DDT en Amérique du Nord, les trois parties ont travaillé ensemble, dans le cadre du plan d’action régional nord-américain de la CCE, pour réduire le risque d’exposition de l’environnement et de la population nord-américaine au lindane Footnote28 et aux autres isomères de l’hexachlorocyclohexane (HCH). Cela inclut l’élimination progressive de l’utilisation pharmaceutique du lindane au Canada Footnote29 .

Le mécanisme de la CCE le plus unique pour assurer la responsabilité des gouvernements à l’égard de l’application des lois environnementales est le processus relatif aux communications des citoyens. Par ce processus de communications sur les questions d’application Footnote30 , les membres de la société civile peuvent informer le Secrétariat de la CCE qu’ils estiment qu’une partie n’applique pas efficacement sa législation environnementale et demander que la situation fasse l’objet d’un examen et d’un exposé des faits de manière indépendante et objective.

Comme nous le verrons plus en détail à la partie IV, l’ACEUM maintient et intègre le processus de communications sur les questions d’application établi dans le cadre de l’ANACDE et en raccourcit les délais afin d’assurer la diffusion des documents factuels en temps utile. L’ACEUM donne également l’occasion au Comité de l’environnement de recommander des activités de coopération sur les questions soulevées dans les enquêtes de la CCE. Au cours des 25 dernières années, plus de 300 parties intéressées et groupes communautaires ont fait part de leurs préoccupations à la CCE par le dépôt de 96 communications portant sur plus de 40 lois environnementales, ce qui a donné lieu à 24 rapports.

IV. Consultations des parties intéressées et des partenaires

Plusieurs séries de consultations ont fait partie du processus d’évaluation des effets sur l’environnement qui sont susceptibles de découler de l’ACEUM. Ces consultations ont notamment été menées auprès du public canadien, des provinces et des territoires, de dirigeants et de représentants autochtones, du Groupe consultatif sur l’évaluation environnementale (GCEE) et du Comité d’évaluation environnementale interministériel, composé de représentants de l’ensemble du gouvernement du Canada.

A. Consultations publiques

De février 2017 à décembre 2019, le gouvernement du Canada a consulté plus de 1 300 parties intéressées à l’occasion de près de 1 100 interactions afin de solliciter l’avis des Canadiens sur la modernisation de l’ALENA, y compris en ce qui a trait à l’environnement. Ces consultations s’inscrivaient dans un vaste effort visant à faire participer les provinces et les territoires, les entreprises, les associations d’entreprises, la société civile, les groupes de travailleurs, les groupes autochtones, les femmes entrepreneures, les universitaires et les jeunes. On a cherché à consulter directement les Canadiens, que ce soit par des rencontres en personne, des assemblées publiques ou des téléconférences tenues sur une base régulière avec les parties intéressées. Le gouvernement s’est aussi servi de mécanismes de plus large portée, comme les invitations à soumettre des avis sur la modernisation de l’ALENA par les voies officielles dans le cadre d’un processus de consultation tenu par l’entremise de la Gazette du Canada (du 3 juin au 18 juillet 2017), ainsi que sur le site Web consacré aux consultations sur l’ALENA. Au cours de ce processus, un certain nombre de parties intéressées, notamment des groupes autochtones, des acteurs du secteur privé dans les secteurs agricole et agroalimentaire, ainsi que des membres de la société civile et du monde universitaire, ont soulevé des questions liées à l’environnement.

En plus du processus général de consultation des parties intéressées, deux séries de consultations publiques officielles ont été organisées, portant spécifiquement sur les effets sur l’environnement. Le premier cycle a été lancé par un avis publié dans la Gazette du Canada le 26 août 2017 – invitant les Canadiens à donner leur avis au sujet des effets possibles sur l’environnement d’un ALENA renégocié. Après la publication de l’EE initiale le 1er décembre 2018, le gouvernement a invité le public à soumettre d’autres communications et commentaires afin de continuer à évaluer les incidences potentielles de l’Accord tout au long des négociations. Le gouvernement a reçu un total de huit communications Footnote31 en réponse à ces exercices de consultation publique. Les communications ont abordé un large éventail de questions, notamment le processus d’évaluation environnementale, l’eau, l’énergie, l’agriculture, la foresterie, la pêche, la biodiversité, les changements climatiques, le règlement des différends entre investisseurs et États, la coopération en matière de réglementation, les dispositions d’application et les points présentant un intérêt particulier pour les peuples autochtones. Ces questions sont présentées en détail dans la section C ci-dessous.

B. Autres consultations

Comité interministériel

Un comité interministériel a participé étroitement à la rédaction et la révision de cette EE finale de l’ACEUM. Ce comité était composé de représentants d’Affaires mondiales Canada, d’Environnement et Changement climatique Canada (ECCC), de l’Agence d’évaluation d’impact du Canada, d’Emploi et Développement social Canada, d’Innovation, Sciences et Développement économique Canada, de Ressources naturelles Canada, de Patrimoine canadien, du ministère des Finances Canada, d’Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC), de l’Agence des services frontaliers du Canada, de Transports Canada, de Pêches et Océans Canada, de Santé Canada, et d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.

Provinces et territoires

Les consultations avec les provinces et les territoires font partie intégrante des évaluations environnementales des négociations commerciales. L’ébauche de cette EE finale a donc été communiquée aux gouvernements provinciaux et territoriaux. Les commentaires reçus recommandaient d'inclure :

  1. l'Accord intergouvernemental sur l'environnement existant;
  2. un partage entre les obligations fédérales et provinciales/territoriales en vertu de l'ACEUM, le cas échéant;
  3. des détails sur la législation provinciale/territoriale existante;
  4. les effets environnementaux localisés potentiels d'un commerce accru;
  5. l'importance de l'application, de la collaboration intergouvernementale et de l'efficacité des structures de gouvernance décrites dans l’Accord de coopération environnementale (ACE) pour réussir l'incidence environnementale;
  6. une analyse rigoureuse des effets environnementaux potentiels d'un commerce accru sur les matières toxiques, les plastiques, les environnements d'eau douce et les engagements en matière de changement climatique.

Ces commentaires ont été pris en compte dans la version finale du document.

Groupe consultatif sur l’évaluation environnementale (GCEE)

Les membres du GCEE indépendant et non gouvernemental ont également participé au processus d’évaluation environnementale et ont été invités à examiner différentes versions de l’EE finale. Compte tenu de la diversité des compétences et des approches représentées au sein du GCEE, les commentaires reçus du groupe ont joué un rôle déterminant dans l’élaboration de l’EE finale. Dans l’ensemble, plusieurs membres du GCEE ont noté avec satisfaction l’évolution positive de la protection de l’environnement dans le cadre de l’ACEUM par rapport à l’ALENA, comme détaillé dans la partie V. En outre, les commentaires des membres du GCEE sur l’EE finale comprenaient des recommandations pour :

  1. améliorer la méthodologie des évaluations environnementales, grâce à une meilleure collecte et une meilleure surveillance des données ainsi qu’à une analyse plus approfondie de la littérature;
  2. approfondir l’analyse de questions spécifiques, y compris les répercussions associées aux populations autochtones, les obstacles au commerce des services environnementaux et les réglementations en matière d’emballage;
  3. inclure plus de détails, fournir plus d’information sur la participation et la consultation du public;
  4. améliorer la clarté et la fluidité du document dans son ensemble.

Ces recommandations ont été prises en compte lors de la finalisation de la présente EE et seront prises en considération pour de futures améliorations de l'approche d'Affaires mondiales Canada en matière d'évaluations environnementales.

C. Principales questions soulevées

Eau

L’eau a été l’un des sujets les plus fréquemment soulevés dans les communications publiques. Le Canada détient environ 9 % de toutes les réserves d'eau douce renouvelables du monde. Les communications ont mis en garde contre la désignation de l’eau comme un produit ou un service sous le régime de l’ACEUM, afin d’empêcher l’exportation en vrac d’eau ou l’exportation de produits connexes comme l’eau en bouteille.

Énergie

La question de l’énergie a été soulevée dans plusieurs communications. En particulier, la « clause de proportionnalité sur l’énergie » de l’ALENA représentait une préoccupation pour certains groupes de la société civile, qui soutenaient que cette clause empêchait le Canada de restreindre ou de réduire ses exportations d’énergie (c’est-à-dire de pétrole, de gaz et d’électricité) vers les États-Unis, et que cela entravait la capacité du Canada d’atteindre ses objectifs d’atténuation des changements climatiques.

Agriculture

L’agriculture a représenté une autre grande source de préoccupations dans les communications reçues. En particulier, les communications ont établi des liens entre l’ALENA et l’utilisation accrue de pesticides et d’autres produits agrochimiques sous l’effet d’une agriculture plus intensive, ce qui a conduit à des pratiques agricoles non durables et à une augmentation des émissions de gaz à effet de serre du Canada (le méthane, en particulier). En ce qui concerne le nouvel accès au marché accordé à l’industrie américaine des produits laitiers, de la volaille et des œufs, les communications reçues ont fait valoir que les pratiques d’élevage industriel du secteur américain sont nettement plus préjudiciables à l’environnement que les pratiques durables de limitation de la production totale en vertu du système canadien de gestion de l’offre. Des préoccupations ont également été exprimées sur le fait que le chapitre sur l’agriculture de l’ACEUM ne fait aucune mention de la durabilité ou de l’environnement.

Règlement des différends entre investisseurs et États

Les communications reçues en réponse à l’avis paru dans la Gazette du Canada en 2017 ont indiqué que le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE) est la disposition de l’ALENA ayant le plus d’incidence sur l’environnement. En particulier, les parties intéressées ont dit craindre que ce mécanisme soit utilisé pour contester des règlements environnementaux et entraver l’exercice légitime de l’autorité gouvernementale dans l’intérêt public. Ces intervenants ont fait valoir que le mécanisme de RDIE de l’ALENA a été utilisé à plusieurs reprises par des entreprises pour contester des politiques environnementales légitimes au Canada (p. ex., Bilcon c. Canada et S.D Myers c. Canada). Selon certaines parties intéressées, le mécanisme de RDIE limite le droit du gouvernement à réglementer et a un effet dissuasif sur la volonté du gouvernement de mettre en œuvre des mesures environnementales et de développement durable. Il est important de noter que des communications plus récentes reçues en réponse à l’avis paru dans la Gazette du Canada en 2018 ont loué la suppression du mécanisme de RDIE pour le Canada dans le cadre de l’ACEUM.

Propriété intellectuelle

Affaires mondiales Canada a invité les Canadiens à donner leur avis sur un large éventail de questions liées à la propriété intellectuelle (PI), tant avant que pendant la renégociation de l’ALENA, notamment par le biais d’un questionnaire, de réunions en personne et de téléconférences avec les parties intéressées. Même si aucune question relative à des règles précises en matière de PI n’a été soulevée en lien avec des préoccupations environnementales, certaines parties intéressées ont fait remarquer que leur modèle commercial implique l’exportation de technologies environnementales vers des marchés étrangers, et qu’un ALENA modernisé favoriserait un cadre de fonctionnement plus transparent et plus prévisible à cet égard. Affaires mondiales Canada a également entendu les parties prenantes qui s’intéressent aux questions liées aux connaissances traditionnelles associées aux ressources génétiques, notamment en ce qui concerne le système de PI.

Peuples autochtones

Les intérêts des peuples autochtones sont apparus comme un thème clé dans les communications reçues, dont un certain nombre laissaient entendre que l’EE initiale n’avait pas permis d’évaluer comme il se doit l’incidence de l’Accord sur les peuples autochtones. Plus précisément, l’Assemblée des Premières Nations a demandé que l’EE finale prenne en considération les vastes répercussions du commerce et des investissements internationaux sur les peuples autochtones, leurs territoires et les droits issus des traités. L’Assemblée a également recommandé d’élargir la portée de l’EE finale afin de déterminer si le nouvel ALENA est conforme à l’engagement pris par le Canada de mettre pleinement en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Environnement et changements climatiques

Les parties intéressées ont souligné l’importance d’obligations complètes et exécutoires dans le domaine de l’environnement et la nécessité d’aborder des questions environnementales importantes comme les changements climatiques. Les parties intéressées ont également rappelé leurs préoccupations concernant le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États, et le besoin d’améliorer le processus de communications sur les questions d’application. En ce qui concerne l’EE finale, certains intervenants ont demandé qu’elle évalue l’incidence de l’Accord sur la foresterie, la pêche et les changements climatiques.

Processus d’évaluation environnementale

Dans un certain nombre de communications reçues, des préoccupations ont été exprimées au sujet du processus d’évaluation environnementale du gouvernement du Canada pour les négociations commerciales. Les préoccupations portaient principalement sur la portée du processus d’évaluation environnementale, qu’il était recommandé d’élargir pour qu’il corresponde aux normes environnementales actuelles, y compris les répercussions sociales, économiques et culturelles. Il a également été suggéré que le processus d’évaluation environnementale expose la façon dont l’Accord peut aider à atteindre les objectifs de développement durable du Canada, tels qu’ils sont définis dans la Stratégie fédérale de développement durable (SFDD) de 2019-2022 Footnote32 , et la façon dont le gouvernement devrait surveiller les effets sur l’environnement de l’ACEUM et en rendre compte à l’aide d’indicateurs quantitatifs.

Il est important de noter que les commentaires reçus ont été pris en compte dans le contexte des négociations, ainsi que dans la rédaction de la présente EE finale. En réponse aux commentaires sur le processus d’évaluation environnementale lui-même, d’importants changements ont été apportés à la structure et à la portée de l’analyse. En particulier, des efforts ont été fournis pour élargir l’évaluation des incidences à la région de l’Amérique du Nord, inclure les effets liés aux populations autochtones, mieux refléter le cadre en vigueur au Canada pour l’atténuation des effets sur l’environnement et établir des liens appropriés avec la SFDD.

V. Résultats obtenus dans le cadre de l’ACEUM et considérations relatives à la mise en œuvre

Constituant la dernière étape dans le processus d’analyse de l’évaluation de l’incidence environnementale, la présente partie met en évidence les dispositions et les chapitres précis de l’ACEUM qui sont de nature à atténuer les risques pour l’environnement et à renforcer la protection de l’environnement dans toute la région nord-américaine. Cette analyse vise à aborder sous l’angle de la politique commerciale les considérations et les préoccupations environnementales soulevées dans des études et des articles universitaires et institutionnels critiques, ainsi que dans les avis formulés par des parties intéressées.

Au cours du processus de consultation, des parties intéressées ont dit craindre en particulier que certaines dispositions de l’ACEUM limitent la capacité du Canada d’élaborer des politiques dans l’intérêt public, notamment en matière de protection de l’environnement. En réponse à ces préoccupations, le chapitre de l’ACEUM sur les exceptions et les dispositions générales (chapitre 32) garantit que les engagements pris par le Canada n’ont pas d’incidence sur sa capacité à adopter ou à maintenir des mesures, des programmes ou des politiques visant à préserver ou à protéger, entre autres, l’environnement. Ce chapitre vient intégrer dans l’ACEUM les dispositions générales et les exceptions qui étaient prévues dans l’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) de 1994 et dans l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) et confirme que les parties conviennent que les mesures visées par ces dispositions comprennent les mesures environnementales nécessaires pour protéger, par exemple, la santé et la vie des personnes, des animaux ou des plantes, ainsi que celles relatives à la conservation des ressources naturelles épuisables biologiques et non biologiques. Cela signifie que le Canada peut adopter des mesures d’intérêt public qui sont incompatibles avec les disciplines établies dans l’ACEUM, mais qui sont nécessaires pour protéger la santé et la vie des personnes, des animaux ou des végétaux, ou qui ont trait à la conservation des ressources naturelles épuisables. La possibilité d’adopter de telles mesures est subordonnée à la condition que celles-ci ne soient pas appliquées de manière à constituer un moyen de discrimination arbitraire ou injustifiable entre les pays où les mêmes conditions prévalent, ou une restriction déguisée au commerce international. Ce chapitre repris de l’ALENA constitue un élément essentiel de tous les accords de libre-échange du Canada.

En plus de cette disposition générale, l’Accord comprend plusieurs dispositions portant expressément sur l’environnement. Aux fins de la présente partie, les chapitres, les annexes et les lettres d’accompagnement énumérés ci-dessous seront examinés Footnote33 . Voir l’annexe B pour obtenir de plus amples informations sur l’objet de chacun de ces chapitres et de ces lettres.

  1. Environnement
  2. Domaines liés aux marchandises
    • Traitement national et accès aux marchés pour les produits
    • Agriculture
    • Énergie
    • Lettre d’accompagnement entre le Canada et les États-Unis sur les ressources naturelles en eau
    • Administration des douanes et facilitation des échanges
    • Mesures sanitaires et phytosanitaires
    • Obstacles techniques au commerce
    • Bonnes pratiques réglementaires
  3. Domaines liés aux services
    • Commerce transfrontières des services
    • Services financiers
  4. Investissement et règlement des différends
  5. Propriété intellectuelle
  6. Commerce et peuples autochtones

A. Environnement

Le Canada est déterminé à défendre le principe selon lequel la libéralisation du commerce et la protection de l’environnement devraient aller de pair. En favorisant, dans nos accords commerciaux, la mise en place d’institutions et de cadres de réglementation stables et transparents dans le domaine de l’environnement, nous procurons aux investisseurs canadiens plus de certitude quant aux pratiques de gouvernance environnementale de nos partenaires commerciaux. Conformément à la ligne de conduite suivie par le Canada dans ses accords de libre-échange, l’ACEUM comprend des dispositions sur l’environnement qui renforcent cet important principe.

L’ALENA a été le premier accord de libre-échange à lier l’environnement et le commerce au moyen d’un accord parallèle historique sur la coopération environnementale, l’ANACDE. L’ACEUM renforce et modernise les dispositions environnementales de l’ANACDE, et les intègre dans l’Accord dans un chapitre sur l’environnement ambitieux, complet et exécutoire, ainsi que dans un Accord de coopération environnementale (ACE) parallèle. Les principales dispositions environnementales obtenues dans le chapitre sur l’environnement et l’ACE sont détaillées ci-dessous. Ces dispositions soutiennent un grand nombre des objectifs de la SFDD Footnote34 .

Application de la loi

Reconnaissant l’importance des engagements pris dans l’ACEUM en matière d’environnement, le Canada s’est efforcé d’établir un processus renforcé de règlement des différends afin de garantir l’application effective des engagements environnementaux de l’Accord. Ainsi, les pays pourront recourir au mécanisme de règlement des différends prévu pour l’ensemble de l’ACEUM s’ils ne parviennent pas à résoudre une question par la consultation et la coopération. La nature exécutoire du nouveau chapitre sur l’environnement de l’ACEUM répond aux préoccupations exprimées par plusieurs parties intéressées sur l’importance d’engagements juridiquement contraignants en matière d’environnement et soutient les entreprises canadiennes en faisant en sorte que nos partenaires commerciaux de l’ACEUM ne bénéficient pas d’un avantage commercial injuste en n’appliquant pas leurs lois sur l’environnement. Qui plus est, comparé à l’ALENA original, le fardeau de la preuve a été inversé, en ce sens que le non-respect d’une obligation énoncée dans le chapitre sur l’environnement est désormais réputé être « d’une manière qui a un effet sur le commerce ou l’investissement entre les parties », à moins que la partie défenderesse puisse démontrer le contraire. Cette disposition procure plus de latitude dans les faits pour remédier à toute violation de l’Accord au moyen du mécanisme de règlement des différends.

Information et consultation du public

Le chapitre sur l’environnement garantit la surveillance en stipulant que chacune des parties doit favoriser la sensibilisation du public relativement à ses lois et politiques environnementales en matière d’environnement, y compris les procédures visant à en assurer l’application et le respect, en faisant en sorte que l’information pertinente soit à la disposition du public. Les parties utilisent également les mécanismes de consultation existants pour solliciter des avis sur les questions liées à la mise en œuvre du chapitre.

En outre, le chapitre maintient et intègre un mécanisme clé, à savoir le processus de communications sur les questions d’application, pour promouvoir la transparence et la participation du public. Créé dans le cadre de l’ANACDE, le processus de communications sur les questions d’application permet aux membres du public nord-américain d’affirmer qu’une partie à l’Accord n’applique pas efficacement ses lois environnementales et de demander un examen et un exposé des faits indépendants et objectifs. On s’attend à ce que ce processus continue de contribuer efficacement à favoriser l’échange d’information avec le public et à approfondir la compréhension du droit de l’environnement et de son application en Amérique du Nord.

Gouvernance et performance environnementales

Le chapitre sur l’environnement de l’ACEUM comprend des obligations fondamentales selon lesquelles les parties doivent maintenir des niveaux élevés de protection de l’environnement et une gouvernance environnementale rigoureuse, y compris en s’engageant à appliquer, au niveau national, leurs lois environnementales; à ne pas déroger à ces lois pour encourager le commerce ou l’investissement; à promouvoir la transparence, la responsabilité et la participation du public; et à assurer la mise en place de processus fédéraux d'évaluation des effets sur l’environnement à l’égard des projets susceptibles d’avoir des effets négatifs sur l’environnement.

Le chapitre sur l’environnement comprend également un nouvel article qui définit sept accords multilatéraux sur l’environnement (AME) et engage les trois parties à mettre en œuvre leurs obligations respectives dans le cadre de ces AME. Pour le Canada Footnote35 , il s’agit de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction, du Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d’ozone, du Protocole de 1978 relatif à la Convention internationale pour la prévention de la pollution par les navires, de la Convention relative aux zones humides d’importance internationale, particulièrement comme habitats des oiseaux d’eau, de la Convention relative à la création d’une commission interaméricaine du thon tropical et de la Convention sur la conservation de la faune et de la flore marines de l’Antarctique Footnote36 .

Ce chapitre établit aussi de nouveaux engagements pour relever un éventail de défis mondiaux, notamment des obligations de fond visant à lutter contre le commerce illégal des espèces sauvages et l’exploitation forestière illégale. Des dispositions relatives à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN) figurant dans ce chapitre encouragent la gestion durable des pêches, notamment par l’engagement d’interdire les subventions qui ont un effet négatif sur les stocks de poissons. L’ACEUM contient également des articles sur la qualité de l’air et les déchets marins, ainsi qu’un engagement contraignant qui interdit la pratique de l’amputation des ailerons de requin, ce qui constitue une première dans un accord de libre-échange. De plus, on y reconnaît le rôle important des peuples autochtones dans la gouvernance environnementale à long terme, la gestion durable des pêches et des forêts et la conservation de la biodiversité. Dans bon nombre de ces domaines (par exemple, la foresterie, la conservation de la faune et la gestion des pêches), les obligations s’appliquent aux niveaux national et infranational.

Bien que plusieurs parties intéressées aient noté l’absence d’engagements particuliers pour lutter contre les changements climatiques, cette lutte reste une priorité pour le Canada. Par exemple, dans l’ACE, les parties se sont engagées à coopérer pour promouvoir des stratégies et des mesures susceptibles de contribuer à la lutte contre les changements climatiques, notamment en ce qui concerne l’efficacité énergétique, les sources d’énergie renouvelables et de remplacement, les technologies à faibles émissions, le transport durable et le développement d’infrastructures urbaines durables, la déforestation et la dégradation des forêts, le renforcement de la capacité de réagir aux phénomènes météorologiques extrêmes, l’agriculture durable, le développement et la promotion de l’utilisation des mécanismes de marché pour améliorer la protection de l’environnement, le commerce et l’investissement dans les biens et services environnementaux, ainsi que la croissance verte et l’innovation propre.

En outre, le chapitre sur l’environnement de l’ACEUM énonce de nouveaux engagements qui visent à renforcer la relation entre le commerce et l’environnement, notamment par la promotion d’une conduite responsable des affaires et de la responsabilité sociale des entreprises, le commerce et l’investissement dans les biens et services environnementaux, ainsi que l’utilisation de mesures volontaires pour améliorer la performance environnementale.

Ce chapitre reconnaît notamment le rôle important des peuples autochtones dans les questions liées à l’environnement. Ce sujet est examiné plus en détail à la section F ci-dessous.

Collaboration trilatérale

L’ACEUM est assorti d’un ACE parallèle, qui garantit que les institutions uniques qui existent depuis 1994 en vertu de l’ANACDE sont maintenues et modernisées, notamment la CCE et son Secrétariat établi à Montréal. Dans le cadre de l’ACE, une CCE modernisée poursuivra la tradition de coopération trilatérale efficace dans le domaine de l’environnement entre le Canada, le Mexique et les États-Unis, y compris au sujet d’enjeux environnementaux mondiaux importants pour le Canada, comme les changements climatiques.

Surveillance fondée sur des faits probants

Le Canada reconnaît l’importance de disposer de données fiables pour éclairer les décisions politiques. Dans l’ACE, le Canada, les États-Unis et le Mexique ont convenu d’appuyer l’établissement d’indicateurs environnementaux régionaux. Ces travaux seront poursuivis par la CCE, qui continuera à produire des plans stratégiques, à diriger des initiatives de durabilité et à élaborer des indicateurs quantitatifs et qualitatifs pour suivre les résultats de ces efforts. En outre, le Conseil ministériel de la CCE peut continuer, comme il le faisait déjà, à demander au Secrétariat de préparer un rapport sur l’état de l’environnement en Amérique du Nord et d’élaborer des recommandations sur les indicateurs communs pour un tel rapport. Ces mesures devraient appuyer la poursuite de la surveillance sur la base de données probantes et répondre aux demandes de parties intéressées pour que des indicateurs de durabilité soient élaborés et utilisés dans le cadre de l’ACEUM.

B. Domaines liés aux marchandises

Les engagements pris dans les domaines liés au commerce des marchandises en vertu de l’ACEUM comprennent des dispositions particulières visant à promouvoir une bonne intendance de l’environnement dans divers secteurs. Ces engagements soutiennent les objectifs de la SFDD en matière de croissance propre, d’énergie propre, d’alimentation durable et de collectivités sûres et saines.

Traitement national et accès aux marchés

L’ACEUM comprend une disposition sur les produits remanufacturés qui peut avoir pour effet d’encourager et de faciliter l’économie circulaire, selon laquelle les produits sont réutilisés plutôt que jetés en tant que déchets. Les dispositions dans ce chapitre précisent que les prohibitions et les restrictions à l’importation ou à l’exportation de produits s’appliquent aux produits remanufacturés. Les produits remanufacturés se distinguent des biens usagés en ce sens qu’ils subissent un traitement important qui va au-delà du nettoyage, de la réparation et de l’entretien et qu’ils retrouvent ainsi un niveau de fonctionnalité plus élevé qu’un bien réparé ou usagé.

Agriculture

L’ACEUM préserve l’accès en franchise de droits aux marchés nord-américains pour une vaste gamme de produits agricoles canadiens, tels que la viande, les céréales, les fruits et les légumes. Il comprend également de nouvelles obligations qui correspondent au secteur agricole et agroalimentaire nord-américain moderne. Par exemple, le chapitre sur l’agriculture comprend un nouveau Comité sur le commerce agricole et reconnaît les comités consultatifs bilatéraux sur l’agriculture existants comme des lieux de collaboration plus poussée sur les questions pertinentes du commerce agricole.

En ce qui concerne les pratiques agricoles durables, les parties à l’ACEUM se sont engagées dans l’ACE à coopérer pour promouvoir l’agriculture durable, notamment en établissant des buts et des objectifs communs pour renforcer la gouvernance environnementale, et conserver et protéger la biodiversité et les habitats. Les activités à ces égards pourraient inclure la promotion de la propreté de l’eau et des sols, et la protection des zones terrestres naturelles. Ces priorités se reflètent également dans les mesures standard des indicateurs agroenvironnementaux (IAE) qu’AAC compile et analyse depuis 1993, et qui mesurent les conditions, les risques et les changements environnementaux clés résultant de l’agriculture et les pratiques de gestion que les producteurs utilisent pour atténuer ces risques. L’échange d’informations avec les parties à l’ACEUM sur les mesures de la santé des sols et les indicateurs de biodiversité, tels que la capacité des habitats fauniques sur les terres agricoles, peut améliorer les résultats globaux liés à ces domaines.

En outre, la facilitation du commerce des produits biotechnologiques entre les parties à l’ACEUM devrait favoriser l’utilisation d’innovations agricoles qui peuvent contribuer à des pratiques agricoles durables et réduire les effets sur le sol, l’eau, l’air et la biodiversité. Les produits issus de la biotechnologie peuvent améliorer la qualité et le rendement des cultures avec moins d’intrants, et leur utilisation est associée à des pratiques agricoles modernes, telles que l’agriculture sans labour et l’agriculture de précision, qui peuvent avoir un effet positif sur l’environnement. Ces investissements et ces pratiques aident à faire en sorte que la croissance de la production ne s’accompagne pas d’une augmentation correspondante des risques pour les ressources agricoles et le milieu environnant.

Énergie

Reconnaissant l’importance du secteur énergétique en Amérique du Nord, ainsi que les considérations environnementales rattachées à ce secteur, l’Accord modernisé contient une annexe sur les normes de rendement énergétique, qui vise à optimiser les avantages pour les consommateurs et l’environnement. Cette annexe favorise les approches visant à promouvoir et à améliorer l’efficacité énergétique pour une série de produits en vue de protéger l’environnement. L’annexe s’appuie sur la coopération en matière de réglementation qui existe déjà entre les parties et indique des domaines de coopération future. Elle vise également à harmoniser les normes de rendement énergétique ou les procédures d’essai appliquées par chacune des parties.

Il est important de noter que l’ACEUM ne contient plus la disposition sur la sécurité de l’approvisionnement en produits énergétiques, appelée « clause de proportionnalité dans le secteur de l’énergie » Footnote37 . En vertu de cette clause, si le Canada ou les États-Unis avaient imposé une restriction à l’exportation d’un produit énergétique, ce pays devait s’assurer que les clients dans l’autre pays avaient l’occasion de faire une proposition sur une proportion de l’offre totale disponible du bien en question qui était équivalente à leur part des exportations récentes du pays invoquant la restriction. Bien que la clause de proportionnalité dans le secteur de l’énergie n’ait jamais été invoquée et qu'elle n’aurait en aucun cas obligé l’une ou l’autre des parties à exporter de l’énergie, elle a été interprétée de manière erronée par certaines parties comme signifiant que le Canada devait maintenir certains niveaux de production intérieure et était tenu de vendre un certain pourcentage de sa production énergétique aux États-Unis, même en cas de pénurie au pays. Néanmoins, la suppression de cette clause dans l’ACEUM rend d’autant plus clair que le Canada conserve toute latitude pour prendre des décisions au sujet de sa production énergétique nationale et adopter des mesures sur son territoire en vue d’atteindre les objectifs en matière de changements climatiques, le cas échéant.

Ressources naturelles en eau

Le Canada reconnaît l’importance de l’eau en tant que ressource pour les Canadiens. Même si le Canada n’a jamais pris d’obligation dans un accord commercial qui l’obligerait à autoriser le prélèvement ou le détournement d’eau aux fins d’exportation à grande échelle, le gouvernement du Canada a pris note des préoccupations exprimées à cet égard dans des communications reçues de parties intéressées et a profité de l’occasion offerte par l’ACEUM pour reconduire la Déclaration de 1993 des gouvernements du Canada, des États-Unis et du Mexique sur les ressources naturelles en eau Footnote38 et préciser que l’Accord ne crée aucune obligation en ce qui concerne l’utilisation de l’eau comme un bien commercial. Le Canada et les États-Unis se sont donc entendus sur une lettre d’accompagnement portant sur les ressources naturelles en eau, qui confirme que l’ACEUM ne confère aucun droit aux ressources en eau d’une partie à l’Accord et ne crée aucune obligation permettant l’exploitation des ressources naturelles en eau d’une autre partie à des fins commerciales, y compris aux fins du prélèvement, de l’extraction ou de la dérivation de l’eau en vue de son exportation à grande échelle.

Administration des douanes et facilitation du commerce

Contrairement à l’ALENA, l’ACEUM comprend un chapitre sur l’administration des douanes et la facilitation du commerce. Le chapitre vise à simplifier les procédures douanières, à réduire les formalités administratives et à assurer une plus grande prévisibilité en matière douanière. Les obligations de ce chapitre qui ont pour but de simplifier les procédures aux frontières devraient permettre de réduire au minimum les coûts de transaction et les effets sur l’environnement liés à la circulation transfrontalière des produits résultant de l’augmentation des échanges commerciaux entre les parties à l’ACEUM en venant, par exemple, raccourcir les délais d’attente pour que les marchandises (en particulier les produits à faible risque) soient libérées du contrôle douanier et favoriser un environnement sans papier. D’autres éléments prévus dans ce chapitre, tels que les décisions anticipées, la gestion des risques, l’automatisation, le guichet unique et les contrôles après dédouanement, contribueront à procurer aux négociants et aux administrations douanières le cadre prévisible dont ils ont besoin à la frontière. Ce cadre permettra de réduire le nombre de cas où des produits sont retenus à la frontière et se traduira par un processus plus efficace qui réduira l’incidence de l’activité frontalière sur l’environnement.

Mesures sanitaires et phytosanitaires

Le chapitre de l’ACEUM sur les mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS) maintient le droit souverain de chaque partie de prendre les mesures SPS nécessaires pour protéger la santé et la vie des personnes, des animaux ou des végétaux, tout en exigeant que ces mesures soient transparentes et fondées sur la science, et ne soient pas appliquées de manière à créer des obstacles inutiles au commerce. L’objectif consiste à assurer que les avantages conférés par l’ACEUM en matière d’accès au marché ne sont pas compromis par des restrictions commerciales injustifiables liées aux mesures SPS dans les secteurs de l’agriculture, de l’agroalimentaire, des poissons et fruits de mer et de la foresterie.

Ce chapitre reconduit le Comité sur les mesures SPS de l’ALENA, qui sert à renforcer la coopération et l’échange de renseignements entre les parties et permet de cerner, à un stade précoce, les mesures SPS proposées ou révisées qui peuvent avoir un effet important sur le commerce en Amérique du Nord et d’en discuter, notamment dans le but d’éviter des problèmes et de permettre une plus grande harmonisation des mesures SPS. Le Comité peut accomplir un certain nombre de tâches, comme établir des groupes de travail techniques. Par exemple, le groupe de travail technique sur les pesticides s’est efforcé de favoriser un régime de réglementation et un cadre commercial efficaces sur le plan des coûts entre les trois pays par l’harmonisation et le partage du travail, tout en tenant compte des objectifs environnementaux, écologiques et relatifs à la santé humaine de l’ALENA. Parmi les exemples récents de travail interinstitutionnel, on peut citer les efforts visant à harmoniser les modèles d’indicateurs de risques pour l’eau utilisés dans l’évaluation des pesticides, ainsi que les discussions entourant l’élaboration du cadre d’évaluation des risques pour les insectes pollinisateurs de l’Amérique du Nord.

Le Comité de l’environnement de l’ACEUM constitué en vertu du chapitre sur l’environnement coordonne ses efforts avec ceux du Comité des mesures SPS afin de cerner les occasions concertées d’échanger des renseignements et des expériences de gestion relativement au déplacement, à la prévention, à la détection, au contrôle et à l’éradication des espèces exotiques envahissantes, dans le but d’améliorer les efforts visant à évaluer les risques et les effets défavorables associés à ces espèces exotiques envahissantes et à les contrer.

Obstacles techniques au commerce

Les dispositions sur les obstacles techniques au commerce (OTC) de l’ACEUM contribuent à s’assurer que des exigences réglementaires inutiles ou discriminatoires n’érodent pas les principaux gains en matière d’accès aux marchés négociés ailleurs dans l’Accord. Normalement, les mesures réglementaires sont fondées sur des préoccupations légitimes, comme le besoin d’établir des mesures de sécurité nécessaires, mais si elles sont mal conçues ou mal utilisées, elles peuvent entraîner un fardeau administratif trop lourd ou un traitement discriminatoire à l’égard des produits fabriqués à l’étranger. La mise en place de mécanismes visant à prévenir, à réduire ou à éliminer les obstacles d’ordre réglementaire constitue l’un des principaux aboutissements des négociations de l’ACEUM. Ce résultat s’appuie sur les obligations énoncées dans les chapitres sur les bonnes pratiques de réglementation et les annexes sectorielles et les complète, ce qui favorise la transparence et la prévisibilité de la réglementation, tout en préservant le droit de chaque partie d’adopter des règlements dans l’intérêt public, y compris les règlements ou les mesures nécessaires pour protéger la vie ou la santé humaine, animale ou végétale.

Le transport des marchandises dangereuses constitue l’une des sources de préoccupations qui ressortent des communications des parties intéressées. À cet égard, l’ACEUM contient une annexe sur les substances chimiques qui reconnaît que l’objectif principal de la réglementation des substances et des mélanges chimiques est la protection de la santé humaine et de l’environnement. L’Accord exige que les parties cherchent à harmoniser, lorsqu’il y a lieu, leurs méthodes d’évaluation des risques et leurs mesures de gestion des risques à l’égard des substances chimiques, et continuent d’améliorer leurs niveaux de protection respectifs (en ce qui concerne entre autres la santé, la sécurité et l’environnement). La définition du terme « danger » qui y figure exige que l’on tienne compte des effets qu’une substance ou un mélange chimique peuvent avoir sur l’environnement. Cette exigence de tenir compte des effets sur l’environnement s’applique aux mesures relatives à la communication des dangers, à l’étiquetage, à la communication de renseignements sur l’utilisation et le stockage de substances chimiques et de mélanges chimiques, aux interventions en milieu de travail en réponse à un danger ou à une exposition, ainsi qu’à l’examen de la délivrance de licences d’importation et d’exportation. L’annexe sur les substances chimiques s’appuie sur la solide coopération en matière de réglementation qui existe déjà entre les parties en ce qui a trait aux produits chimiques et définit les domaines d’intervention potentiels pour une future coopération. La protection de l’environnement pourrait ainsi être renforcée dans la mesure où cette disposition conduit à une coopération nouvelle et efficace et à de meilleurs niveaux de sécurité.

Bonnes pratiques de réglementation

Le Canada reconnaît que la réglementation est un outil important pour obtenir de meilleurs résultats sur les plans économique et social, y compris pour protéger la santé, la sécurité et l’environnement. Ce chapitre s’appuie sur les obligations prévues dans les chapitres sur les obstacles techniques au commerce et les annexes sectorielles, qui favorisent la transparence et la prévisibilité de la réglementation tout en préservant le droit de chaque partie d’adopter des règlements dans l’intérêt public, et il les complète. Le chapitre préserve le droit de chaque partie de chercher à atteindre les objectifs nationaux qu’elle juge nécessaires en matière d’environnement et comprend une disposition d’application stipulant qu’aucune partie ne doit omettre d’appliquer effectivement ses lois environnementales par une action ou une inaction soutenue ou récurrente d’une manière qui affecte le commerce ou l’investissement entre les parties.

Le chapitre encourage les organismes de réglementation à poursuivre leur coopération en matière de réglementation par l’intermédiaire de l'actuel Conseil de coopération en matière de réglementation entre le Canada et les États-Unis, ainsi que dans le cadre de l’ACEUM, afin de réduire le fardeau inutile des entreprises en Amérique du Nord. Ce chapitre crée un comité trilatéral pour diffuser l’expertise et les renseignements sur les modes de coopération en matière de réglementation, qui pourraient inclure la coopération dans le domaine de l’environnement.

C. Domaines liés aux services

Les engagements pris dans les domaines liés au commerce des services en vertu de l’ACEUM soutiennent les objectifs de la SFDD en matière de mesures efficaces pour les changements climatiques et la croissance propre. En outre, la diffusion d’innovations environnementales par le commerce des services devrait également contribuer à la réalisation d’autres objectifs de la SFDD, notamment des infrastructures modernes et résistantes, une énergie propre, une eau potable propre et un approvisionnement alimentaire durable.

Commerce transfrontières des services

Le chapitre sur le commerce transfrontières des services contribue à assurer la prévisibilité du commerce des services, ce qui comprend les services environnementaux, et reconnaît le droit de maintenir ou d’adopter des règlements liés à la protection de l’environnement. En ce qui concerne l’accès aux marchés assuré, ce chapitre réaffirme la libéralisation du commerce du Canada pour les importations de services d’évacuation des eaux usées, d’élimination des déchets, d’assainissement et d’autres services environnementaux (comme l’épuration des gaz d’échappement, la réduction du bruit, la protection de la nature et des paysages), et lie des engagements supplémentaires assurant l’accès aux marchés des États-Unis et du Mexique pour les exportations canadiennes de services environnementaux, tels que la gestion des déchets, la protection de l’air ambiant et du climat, l’assainissement et la dépollution des sols et des eaux, la protection de la biodiversité et des paysages, et d’autres services environnementaux et auxiliaires. Ces engagements en matière d’accès aux marchés, ainsi que certains engagements élargissant l’accès aux marchés pour les services d’ingénierie, ainsi que de recherche et développement, pourraient soutenir davantage le commerce de solutions environnementales.

Ce chapitre permet à chaque partie de maintenir ou d’adopter des mesures à l’égard de secteurs de services particulièrement sensibles et pour lesquels chaque partie doit conserver une souplesse sur le plan des politiques pour adopter des règlements favorisant des processus durables en matière d’environnement. En conséquence, le Canada énumère des réserves s’appliquant à différents ordres de gouvernement, notamment pour la santé et les autres services sociaux, le cabotage maritime, la pêche, ainsi que les affaires relatives aux autochtones et aux minorités. Ces mesures peuvent concerner la protection de l’environnement dans le contexte du maintien de la santé et de la sécurité publiques, de la gestion des pêches, de la préservation des parcs nationaux, ainsi que de la certification et de l’inscription des navires.

En outre, le chapitre comprend de nouvelles dispositions sur l’élaboration et l’administration de mesures couvrant les exigences et les procédures en matière de licences et de qualifications, qui précisent les « critères objectifs et transparents » qui ne constituent pas des obstacles inutiles au commerce des services. Le chapitre précise que les « critères objectifs et transparents » comprennent également « les effets potentiels d’une autorisation sur la santé ou l’environnement » et que « les autorités compétentes peuvent évaluer l’importance accordée à ces critères ». Cette précision permet à une partie de l’ACEUM d’adopter ou de maintenir une mesure relative aux exigences et procédures d’autorisation et de qualification pour des raisons environnementales. Par exemple, les demandeurs dans les secteurs des transports ou des services de construction peuvent être tenus de démontrer leur capacité à respecter la réglementation environnementale régissant les activités dans ces secteurs dans le cadre d’un processus d’autorisation.

Dans la mesure où le chapitre garantit un accès prévisible au marché des services environnementaux entre les parties à l’ACEUM et leur permet de maintenir ou d’adopter des mesures favorisant des processus respectueux de l’environnement, l’expertise du secteur privé en matière d’atténuation des effets sur l’environnement pourrait fournir des solutions supplémentaires pour la protection de l’environnement, qui pourraient être fournies sur une base transfrontalière.

Bien que les engagements en matière de commerce transfrontières des services garantissent l’absence d’obstacles à la fourniture de services environnementaux, en ce qui concerne les services en personne, les engagements concernant l’admission temporaire des gens d’affaires sont limités, ce qui signifie que seuls certains professionnels du secteur des services environnementaux peuvent bénéficier des engagements réciproques pour faciliter l’entrée en vertu de l’ACEUM. Par conséquent, certains experts et certains travailleurs peuvent être confrontés à des limitations telles que des tests de besoins économiques et des quotas, ce qui rend plus difficile l’obtention de l’autorisation de travail nécessaire.

Services financiers

Bien qu’il n’y ait pas d’effets prévisibles sur l’environnement à la suite des engagements pris dans l’ACEUM dans le domaine des services financiers, le Canada, les États-Unis et le Mexique ont convenu de créer un Forum sur la réglementation financière (le Forum) en marge de l’Accord. L’objectif du Forum est d’améliorer le dialogue et la coopération en matière de réglementation entre les autorités de réglementation du secteur financier, notamment dans des domaines tels que la finance durable. Une collaboration opportune sur cette question permettra aux parties à l’ACEUM de disposer des structures de financement et d’investissement appropriées pour lutter contre les changements climatiques, bâtir une économie à faibles émissions de carbone et aider les ménages et les entreprises à gérer les risques climatiques.

D. Investissement et règlement des différends

Le chapitre sur l’investissement de l’ACEUM ne fait pas obstacle à la protection de l’environnement dans le contexte des investissements réalisés dans la région de l’Amérique du Nord, puisqu’il maintient à la fois l’obligation pour les investisseurs étrangers de se conformer aux lois et aux règlements canadiens et le droit des parties d’adopter des règlements pour atteindre des objectifs politiques légitimes, y compris dans le domaine de la protection de l’environnement. De plus, le chapitre comprend une disposition sur la responsabilité sociale des entreprises (RSE) qui réaffirme l’importance d’encourager les entreprises à respecter les normes de responsabilité sociale, comme les Principes directeurs de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à l’intention des entreprises multinationales. Cette disposition sur la RSE fournit une liste indicative des domaines connexes à la RSE, notamment l’environnement. Ces dispositions devraient favoriser une bonne intendance de l’environnement par les investisseurs nord-américains dans toute la région.

Contrairement à l’ALENA, l’ACEUM ne comprend pas de mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE) qui s’applique au Canada Footnote39 . L’absence de RDIE apaise les inquiétudes des parties intéressées, qui craignent que le RDIE entrave le droit de réglementation des gouvernements et les dissuade de mettre en œuvre des mesures en faveur de l’environnement et du développement durable. Les obligations en matière d’investissement demeureront assujetties au mécanisme de règlement des différends entre États de l’Accord, qui procure un moyen transparent, ouvert et clair de résoudre les différends entre les parties à l’ACEUM concernant l’interprétation ou l’application de l’Accord.

E. Propriété intellectuelle

Le chapitre de l’ACEUM consacré à la propriété intellectuelle (PI) contient des dispositions sur la protection de presque toutes les catégories de droits de PI, y compris les brevets. Le chapitre sur la PI de l’ACEUM entérine les modalités souples dont les parties bénéficient de longue date sur le plan multilatéral dans le cadre de l’OMC, en prévoyant que chacune d’elles « peut exclure de la brevetabilité les inventions dont il est nécessaire d’empêcher l’exploitation commerciale sur son territoire pour protéger l’ordre public ou la moralité, y compris pour protéger la vie ou la santé des personnes et des animaux ou préserver les végétaux, ou pour éviter de graves atteintes à la nature ou à l’environnement ». Le chapitre prévoit qu’une partie peut également exclure de la brevetabilité les végétaux autres que les micro-organismes, mais confirme que des brevets peuvent être obtenus au moins pour les inventions dérivées de plantes.

L’une des principales considérations liées à la PI en matière d’environnement concerne le brevetage des technologies environnementales, notamment dans le domaine des changements climatiques. Cet élément est particulièrement important pour les quelque 850 entreprises canadiennes actives dans la recherche et développement (R-D), la fabrication ou la vente de technologies propres Footnote40 . Même si le chapitre sur la PI de l’ACEUM ne contient pas de dispositions particulières visant à faciliter le brevetage des technologies environnementales, il établit un cadre transparent et prévisible pour assurer la protection et l’application des droits de PI pour les entreprises canadiennes, y compris les nouvelles entreprises et les petites et moyennes entreprises (PME), qui exercent des activités dans le marché nord-américain. Par exemple, le chapitre comporte des dispositions visant à assurer la transparence et l’efficacité des pratiques des bureaux des brevets des trois parties.

En ce qui concerne les questions liées à la PI et aux savoirs traditionnels associés aux ressources génétiques, bien que le chapitre de l’ACEUM sur la PI ne contienne pas de dispositions dans ces domaines, le Canada participe activement aux discussions sur ces questions au sein du Comité intergouvernemental de la propriété intellectuelle relative aux ressources génétiques, aux savoirs traditionnels et au folklore (IGC) de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Le Canada a depuis longtemps pour position que le IGC constitue le cadre le plus approprié pour discuter des liens possibles entre ces domaines. Pour soutenir la participation à ces discussions multilatérales, le gouvernement du Canada a récemment conclu des accords avec des organisations autochtones afin de financer l’envoi de représentants aux réunions du IGC de l’OMPI et a récemment organisé un atelier en collaboration avec l’OMPI pour la région arctique.

Enfin, bien que le chapitre sur la PI de l’ACEUM ne contienne pas de disposition sur la coopération en matière de questions environnementales liées à la PI, il crée un Comité sur les droits de propriété intellectuelle, qui permettra aux parties d’échanger de l’information et des renseignements sur les questions relatives à la PI. Même si les questions environnementales ne sont pas explicitement mentionnées parmi les domaines de coopération énumérée dans le chapitre, une partie peut soulever toute question d’intérêt liée à la PI, y compris celles qui concernent l’environnement.

F. Commerce et peuples autochtones

Reconnaissant le rôle des peuples autochtones dans la conservation de l’environnement et le fait qu’ils peuvent être grandement touchés par les effets qui sont susceptibles de s’exercer sur l’environnement, le Canada a cherché à s’assurer que les intérêts et les priorités des peuples autochtones seraient pris en compte tout au long des négociations. Au cours du processus de négociation, le gouvernement s’est entretenu avec des dirigeants et des représentants autochtones, des entrepreneurs autochtones et des experts en politiques, notamment sur les questions relatives aux dispositions environnementales de l’Accord. Cette démarche s’est inscrite dans le cadre des efforts déployés par le gouvernement pour promouvoir les droits, la prospérité et le développement durable des Autochtones au Canada et dans le monde.

Comme dans tous ses accords de libre-échange, le Canada a conservé toute latitude pour adopter des politiques de façon à pouvoir promouvoir les intérêts des peuples autochtones et des entrepreneurs autochtones, y compris dans le domaine de l’environnement. Un autre important résultat obtenu est l’inclusion d’une exception générale qui vient confirmer sans équivoque que le gouvernement peut adopter ou maintenir les mesures qu’il estime nécessaires pour s’acquitter de ses obligations juridiques à l’égard des peuples autochtones. Une première dans un accord de libre-échange du Canada, cette exception comprend une note de bas de page qui précise que, pour le Canada, les obligations juridiques comprennent celles reconnues et affirmées par l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 ou celles énoncées dans les accords d’autonomie gouvernementale entre un gouvernement central ou régional et les peuples autochtones. Cette formulation prospective et inclusive vise à permettre l’inclusion de tout autre droit autochtone qui pourrait être codifié dans le droit canadien à l’avenir.

En plus de l’exclusion liée à l’exploitation des ressources naturelles par les Autochtones, le chapitre sur l’environnement comprend des dispositions qui reconnaissent le rôle important des peuples autochtones dans la conservation à long terme de l’environnement, la gestion durable des pêches et des forêts et la conservation de la biodiversité. De plus, dans l’ACE, les parties ont convenu de favoriser une participation inclusive et diversifiée du public, y compris des peuples autochtones, dans la conception, la mise en œuvre et le suivi des activités de coopération.

VI. Lois, règlements et mesures en vigueur en matière d’environnement

Les effets attendus révélés par l’analyse environnementale doivent être considérés dans le contexte des lois, des règlements, des politiques et des mesures en vigueur au Canada, qui contribuent à prévenir et à gérer les risques pour l’environnement au Canada. En particulier, le gouvernement fédéral gère une vaste gamme d’enjeux environnementaux par l’entremise de diverses mesures : la mise en œuvre du Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques Footnote41 ; la collaboration avec ses partenaires stratégiques, notamment les provinces, les territoires et les peuples autochtones; la surveillance; la recherche scientifique; l’élaboration de politiques et de règlements; et l’application des lois environnementales. Le cadre législatif en matière d’environnement vise à : réduire au minimum les dangers auxquels sont exposés les Canadiens et leur environnement en raison de la pollution; donner aux Canadiens les moyens permettant de prendre des décisions éclairées dans le domaine de la météo, de l’eau et du climat; et conserver et rétablir l’environnement naturel du Canada. Ce cadre environnemental solide place le Canada en bonne position pour atténuer les effets potentiels de l’ACEUM sur l’environnement.

La présente partie donne un aperçu du cadre législatif en matière d’environnement du gouvernement du Canada, tant au niveau national que sectoriel. Bien que cet aperçu se concentre sur les lois, les règlements, les politiques et les mesures mis en œuvre par le gouvernement fédéral, il est entendu que les gouvernements des provinces et des territoires ont également des rôles et des responsabilités de premier plan dans la prévention et la gestion des risques environnementaux, y compris au moyen d’un grand nombre de lois et de règlements en la matière. Étant donné les différents rôles qu’ils doivent remplir, le gouvernement fédéral et les gouvernements des provinces et des territoires entretiennent une coopération étendue dans ces domaines.

A. L’approche du Canada en matière d’environnement

En vertu de notre constitution, la gestion des questions environnementales au Canada est un domaine de compétence partagée entre le gouvernement fédéral et les provinces. Le gouvernement fédéral collabore avec les provinces, les territoires, les peuples autochtones et d’autres acteurs pour protéger les espèces et les espaces, pour élaborer des normes, des lignes directrices, des règlements et d’autres instruments de gestion des risques environnementaux afin de réduire ou de prévenir les rejets de polluants, et pour surveiller les niveaux de contaminants dans l’air, l’eau et le sol. Le gouvernement fédéral fait respecter ses lois et règlements en matière d’environnement et en fait la promotion. Les normes environnementales et de rendement fixées par ces instruments resteront en place indépendamment des changements qui peuvent se produire dans l’activité économique ou le commerce international, y compris du fait de l’ACEUM. Le suivi des changements dans l’environnement et les rapports sur une base régulière à cet égard sont essentiels pour évaluer l’incidence des risques et l’efficacité des mesures visant à prévenir ou à réduire ces risques, et constituent un élément important des travaux scientifiques qui soutiennent la mise en œuvre du cadre environnemental du Canada.

B. Stratégie fédérale de développement durable du Canada (SFDD)

La SFDD énonce les priorités du gouvernement du Canada en matière de durabilité environnementale, établit des objectifs soutenus par des cibles à moyen terme, et précise les jalons à poser et les mesures à prendre à court terme pour les atteindre. Il s’agit de la quatrième stratégie pangouvernementale du Canada qui rassemble les activités de durabilité du gouvernement du Canada en un seul document. Elle décrit les mesures que prendra le gouvernement fédéral, par l’entremise de ses 43 ministères et organismes, pour favoriser une croissance propre, préserver des écosystèmes sains et construire des collectivités sûres, sécuritaires et durables au cours des trois prochaines années. La SFDD reste également étroitement liée aux priorités gouvernementales et tient compte d’initiatives clés telles que les efforts pour mettre en œuvre le Programme 2030 Footnote42 des Nations Unies, le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques, le Plan de protection des océans Footnote43 et les travaux entrepris pour traiter les déchets plastiques et promouvoir les véhicules à zéro émission. Les indicateurs permettant de suivre les progrès réalisés par rapport aux objectifs et cibles de la SFDD sont tirés en grande partie du programme des Indicateurs canadiens de durabilité de l’environnement Footnote44 , y compris en ce qui concerne la réduction des émissions de GES au Canada. La SFDD suit également les progrès accomplis par le gouvernement fédéral pour remplir l’engagement qu’il a pris dans le cadre de la Mission d’innovation de doubler les investissements dans la recherche, le développement et la démonstration en matière d’énergie propre, afin de les faire passer de 387 millions de dollars en 2015 à 775 millions de dollars en 2020, ainsi que de réduire d’ici 2030 les émissions de GES provenant des activités gouvernementales de 40 % par rapport à leurs niveaux de 2005, avec l’aspiration d’être neutre en carbone d’ici 2050.

Parmi les 13 objectifs fixés par la SFDD, ceux qui sont énumérés ci-dessous présentent un intérêt particulier dans le contexte des effets escomptés sur l’environnement de l’ACEUM :

C. Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques

Le Cadre pancanadien sur la croissance propre et les changements climatiques est un engagement conjoint entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux pour prendre des mesures ambitieuses afin de lutter contre les changements climatiques, renforcer la résilience à ceux-ci et favoriser une croissance économique propre. Il s’agit du premier plan sur les changements climatiques de l’histoire du Canada à inclure des engagements conjoints et individuels des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, et à avoir été élaboré en fonction des commentaires reçus des peuples autochtones, d’entreprises, d’organisations non gouvernementales et de Canadiens de tout le pays. Le Cadre pancanadien s’appuie sur quatre piliers : la tarification de la pollution par le carbone, les mesures complémentaires visant à réduire les émissions dans l’ensemble de l’économie, l’adaptation et la résilience aux changements climatiques, ainsi que les technologies propres, l’innovation et l’emploi.

Parmi les principaux domaines définis dans le Cadre pancanadien, les plans énumérés ci‑dessous présentent une pertinence particulière dans le contexte des effets escomptés de l’ACEUM :

D. Principaux éléments de la législation fédérale en matière d’environnement au Canada

Les principales lois fédérales traitant de la protection de l’environnement sont les suivantes :

E. Plan de gestion des produits chimiques

Le Plan de gestion des produits chimiques Footnote64 est une initiative du gouvernement du Canada qui vise à réduire les risques que posent les substances chimiques pour les Canadiens et leur environnement.

Si la plupart des mesures de gestion des risques liés aux produits chimiques sont prises en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999), des mesures peuvent également être prises pour élaborer des instruments en vertu d’autres lois, telles que la Loi canadienne sur la sécurité des produits de consommation Footnote65 , la Loi sur les produits antiparasitaires Footnote66 et la Loi sur les aliments et drogues Footnote67 . Par conséquent, au moment de prendre une décision relative à la gestion des risques, une attention particulière est accordée à la loi qui permettrait de mieux gérer les risques définis.

F. Système canadien de gestion de la qualité de l’air

En octobre 2012, les ministres de l’Environnement du gouvernement fédéral et des gouvernements des provinces et des territoires, à l’exception du Québec, qui possède ses propres politiques en matière de gestion de l’air, ont convenu de mettre en œuvre un Système de gestion de la qualité de l’air (SGQA) à l’échelle du Canada. Le SGQA représente une approche globale pour réduire la pollution atmosphérique au Canada, et il est le fruit d’une collaboration sans précédent des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, et des parties intéressées. Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux exercent tous des rôles et des responsabilités dans la mise en œuvre du système. Les normes canadiennes de qualité de l’air ambiant (NCQAA) sont le moteur de la gestion de la qualité de l’air au Canada. Des normes ont été élaborées pour le dioxyde d’azote, le dioxyde de soufre, les matières particulaires fines (MP2,5) et l’ozone. Les NCQAA sont établies en tant qu’objectifs à atteindre en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999).

G. Lois, politiques et mesures sectorielles

Le Canada tire parti de ses liens bilatéraux et multilatéraux dans des organisations clés à l’échelle internationale pour soutenir les plus vastes efforts déployés dans le monde entier en vue de lutter contre les changements climatiques et de gérer les risques environnementaux. Dans le cadre de l’Accord de Paris, le Canada s’est engagé à réduire de 30 % ses émissions de GES d’ici 2030 par rapport à leurs niveaux de 2005. Le Canada fournit également du financement pour la lutte contre les changements climatiques afin d’aider les pays en développement à devenir des économies à faibles émissions de carbone et résilientes face au climat. Pour la période allant de 2015-2016 à 2020‑2021, le Canada versera 2,65 milliards de dollars aux pays en développement pour la lutte contre les changements climatiques.

Des politiques et des règlements précis présentent un intérêt particulier compte tenu des risques environnementaux cernés dans l’EE initiale de l’ACEUM. Sur le plan sectoriel, ces politiques et ces règlements peuvent aider à contrôler les risques limités liés aux secteurs manufacturier et minier, aux transports et à l’agriculture et l’agroalimentaire.

Fabrication et industrie minière

Le cadre réglementaire régissant les effets sur l’environnement de la fabrication comprend la LCPE et ses règlements. La prévention et la gestion des risques liés aux substances toxiques et à d’autres substances dangereuses sont des aspects essentiels de la LCPE. Conformément à la LCPE, des installations de fabrication peuvent devoir divulguer leurs émissions de certains polluants au moyen de divers programmes comme l’Inventaire national des rejets de polluants (INRP) et le Programme de déclaration des émissions de GES d’ECCC. Les émissions de polluants dans l’eau découlant de la fabrication industrielle sont également assujetties à la Loi sur les pêches, qui interdit le rejet de substances délétères dans les eaux où vivent des poissons, mais aussi les activités qui causent de graves préjudices aux poissons, à moins qu’elles ne soient autorisées par règlement.

Il est important de noter que les niveaux d’émissions et d’effluents du secteur canadien des pâtes et papiers sont soumis à un certain nombre de règlements et d’activités de surveillance, notamment le Règlement sur les effluents des fabriques de pâtes et papiers pris en application de la Loi sur les pêches, ainsi que le Règlement sur les additifs antimousse et les copeaux de bois utilisés dans les fabriques de pâtes et papiers, le Règlement sur les dioxines et les furannes chlorés dans les effluents des fabriques de pâtes et papiers et le Code de pratiques pour la gestion des émissions atmosphériques des installations de pâtes et papiers établis en application de la LCPE. Le Code de pratiques encourage les meilleures pratiques en matière de performance environnementale des usines de pâtes et papiers au Canada en ce qui concerne les émissions atmosphériques de dioxyde de soufre (SO2) et de matière particulaire totale (MPT).

Pour les projets de grande envergure, y compris dans le secteur minier, la Loi sur l’évaluation d’impact et ses règlements établissent le fondement législatif du processus fédéral d’évaluation des impacts des projets. Qu’ils soient canadiens ou étrangers, les promoteurs de projets désignés (tels qu’ils sont définis dans le Règlement sur les activités concrètes Footnote68 ) peuvent être tenus de procéder à une évaluation d’impact pour déterminer si les effets négatifs d’un projet sont dans l’intérêt du public. Pour les secteurs de l’extraction et de la transformation, les émissions atmosphériques et les effluents sont soumis à un certain nombre de règlements et d’activités de surveillance, notamment le Règlement sur les effluents des mines de métaux et des mines de diamant (pris en vertu de la Loi sur les pêches), ainsi que d’autres instruments fédéraux (p. ex., codes de pratique, ententes sur la performance environnementale, avis de planification de la prévention de la pollution).

Transports

ECCC a mis en œuvre six règlements sur les émissions des véhicules et des moteurs et neuf règlements sur les carburants afin de réduire les polluants atmosphériques et les émissions de GES des véhicules routiers et hors route et de leurs moteurs conformément à la LCPE. Transports Canada dirige une série de mesures réglementaires et volontaires visant à réduire les émissions de GES des secteurs aérien, maritime et ferroviaire. En ce qui concerne le secteur du transport maritime en particulier, la Loi sur la marine marchande du Canada prévoit des règlements pour protéger l’environnement marin contre la navigation et les activités de transport maritime.

Agriculture et agroalimentaire

Le gouvernement fédéral, en collaboration avec ses homologues provinciaux et territoriaux, a élaboré la Stratégie sur les espèces exotiques envahissantes pour le Canada Footnote69 . Cette stratégie oriente les efforts nationaux visant à résoudre les problèmes liés à l’introduction d’espèces envahissantes au Canada. Cette initiative pangouvernementale met à contribution Agriculture et Agroalimentaire Canada (AAC), Pêches et Océans Canada, ECCC, Ressources naturelles Canada et l’Agence canadienne d’inspection des aliments.

Par l’intermédiaire d’accords relatifs au Cadre stratégique pour l’agriculture conclus avec les provinces et les territoires, AAC consacre des fonds pour appuyer la mise en œuvre de mesures à la ferme sous la forme de pratiques de gestion bénéfiques, lesquelles peuvent atténuer les effets agroenvironnementaux négatifs et contribuer à améliorer la qualité de l’eau, la biodiversité et l’adaptation aux changements climatiques.

Le cadre actuel de la politique agricole, le Partenariat canadien pour l’agriculture (PCA) Footnote70 , met davantage l’accent sur l’atténuation des changements climatiques et l’adaptation à ceux-ci, la durabilité environnementale et la science, dans le but d’améliorer encore la performance environnementale du secteur agricole. Au moyen de programmes, il pourrait être possible de rendre le secteur agricole plus rapidement en mesure de réduire les plus grandes sources d’émissions de GES, comme l’oxyde nitreux. AAC travaille en partenariat avec les provinces et les territoires pour soutenir les secteurs agricole, agroalimentaire et agro-industriel afin d’évaluer les risques environnementaux prioritaires et d’y réagir, et d’intégrer des pratiques durables.

Par l’entremise d’AAC, le gouvernement du Canada investit aussi dans l’agriculture durable en appuyant les mesures directes à la ferme, la mise en œuvre de pratiques de gestion bénéfiques et les activités de recherche et développement innovantes qui contribuent à la croissance durable du secteur. Parmi ces activités de recherche et développement, notons l’amélioration de l’efficacité des ressources et des intrants (p. ex., eau, terres et nutriments), le développement de nouvelles variétés de cultures, l’amélioration du rendement des cultures et l’élaboration de technologies et de pratiques de gestion bénéfiques.

Parmi les programmes propres à AAC, la série de programmes de gestion des risques de l’entreprise joue également un rôle important pour assurer la continuité des activités Footnote71 . Ces programmes peuvent renforcer la résilience du secteur face aux risques liés à l’environnement, tels que les parasites, la sécheresse ou les inondations. Par exemple, le programme Agri-investissement peut permettre aux producteurs participants de prendre des décisions plus stratégiques fondées sur les perspectives à long terme plutôt que sur les besoins de trésorerie à court terme. Les producteurs pourraient ainsi disposer d’une plus grande marge de manœuvre pour diversifier leurs cultures et utiliser des pratiques agricoles, comme la rotation des cultures, qui ont des effets positifs sur la qualité du sol et de l’environnement. Dans l’ensemble, le cadre législatif actuel du gouvernement du Canada dans le domaine environnemental est bien placé pour atténuer tout effet de l’ACEUM sur l’environnement. À mesure que de nouvelles lois, de nouveaux règlements, de nouvelles politiques et de nouvelles mesures sont élaborés et mis en œuvre, l’amélioration de la performance environnementale des secteurs de l’économie canadienne pourrait contribuer à atténuer les effets que l’ACEUM serait susceptible d’avoir sur l’environnement.

VII. Conclusion

L’ALENA a été le premier accord de libre-échange de l’histoire à établir un lien entre l’environnement et le commerce. Il l’a fait au moyen d’un accord parallèle, l’ANACDE. Avec cet accord parallèle en vigueur, les données suggèrent que le bilan environnemental de l’ALENA depuis son entrée en vigueur a été équilibré, ce qui a entraîné des résultats positifs et négatifs au pays et dans l’ensemble de l’Amérique du Nord. Avec la renégociation de l’ALENA, le Canada, les États-Unis et le Mexique ont saisi l’occasion de renforcer et de moderniser les dispositions environnementales existantes, de les intégrer dans l’Accord et d’établir un nouveau chapitre sur l’environnement, qui est complet et exécutoire. Le résultat final obtenu dans l’ACEUM préserve des éléments clés de l’ALENA et maintient les structures institutionnelles, comme l’ACE et la CCE, pour surveiller et aborder efficacement les effets que le commerce est susceptible d’avoir sur l’environnement, et collaborer avec les partenaires nord-américains pour atteindre l’objectif du développement durable dans la région. Étant conscient qu’il serait difficile de rallier un soutien trilatéral en faveur d’obligations en matière de changements climatiques, le Canada a cherché à faire en sorte que l’Accord témoigne de l’importance que le Canada accorde aux changements climatiques, notamment en obtenant la garantie que les parties pourront coopérer pour promouvoir des stratégies et des mesures qui jouent un rôle important dans la lutte contre les changements climatiques, comme l’utilisation de sources d’énergie renouvelables et de remplacement, ainsi que de technologies à faibles émissions.

De plus, l’ACEUM modernise un certain nombre de dispositions pour résoudre des questions propres au commerce d’aujourd’hui, réduire les formalités à la frontière et procurer plus de certitude et de stabilité aux travailleurs et aux entreprises dans l’ensemble du marché nord-américain intégré. Les gains liés à ces nouvelles dispositions, tels que l’augmentation de l’efficacité des transports, le passage à des procédures sans papier et l’accroissement des échanges de services et de technologies durables en matière d’environnement, pourraient renforcer l’effet positif que l’ACEUM aura sur l’environnement par rapport à l’ALENA original.

À la lumière des études d’impact environnemental qui ont été réalisées au sujet de l’ALENA, ainsi que de l’évaluation qualitative, chapitre par chapitre, des dispositions relatives à l’environnement prévues dans l’ACEUM, l’EE initiale et l’EE finale arrivent toutes deux à la conclusion que l’ACEUM aura une incidence plus positive sur l’environnement que l’ALENA, puisque ce nouvel accord devrait renforcer la protection de l’environnement et les pratiques de gouvernance dans ce domaine en Amérique du Nord.

Les commentaires sur l’évaluation environnementale finale (EE) de l’ACEUM sont les bienvenus. Cela aidera à éclairer les futurs rapports d'EE.

Les commentaires peuvent être envoyés par courrier électronique ou par la poste, à :

Courriel : EAconsultationsEE@international.gc.ca
Poste : Secrétariat des évaluations environnementales
Secrétariat de l’ALENA et des accords commerciaux (TCT)
Affaires mondiales Canada
125, promenade Sussex
Ottawa (Ontario)  K1A 0G2

Annexe A ‒ Bibliographie de publications savantes portant sur l’ALENA et l’environnement

Publications de la Commission de coopération environnementale (CCE) :

Cadre d’analyse pour l’évaluation des répercussions environnementales de l’ALENA, Commission de coopération environnementale, 1999.

L’évaluation des répercussions environnementales de l’ALENA – Cadre d’analyse (phase II) et études d’enjeux, Commission de coopération environnementale, 1999.

Environmental Assessment of NAFTA: Lessons Learned from CEC’s Trade and Environment Symposia, Commission de coopération environnementale, novembre 2008.

Répercussions de l’ALENA – Répercussions possibles de l’ALENA: déclarations et arguments 1991-1994, Commission de coopération environnementale, 1996.

PLAGIANNAKOS, Takis. Le libre-échange de l’électricité entre l’Ontario/le Canada et les États-Unis améliorera-t-il la qualité de l’air?, Commission de coopération environnementale, 2002.

Les effets environnementaux du libre-échange – Documents de recherche présentés à l'occasion du Symposium nord-américain sur les liens entre l'environnement et le commerce, Commission de coopération environnementale, octobre 2000.

VAUGHAN, Scott et Greg BLOCK. Libre-échange et environnement : un tableau plus précis de la situation, Commission de coopération environnementale, 2002.

Publications de recherche :

BARBIER, Edward. « Introduction to the environmental Kuznets curve special issue », Environment and Development Economics, 1997

CHARNOVITZ, Steve. « NAFTA’s Environmental Significance », Environment, vol. 36, no 2, 1994.

CHERNIWCHAN, Jevan. « Trade liberalization and the environment: Evidence from NAFTA and U.S. manufacturing », Journal of International Economics, vol. 105, 2017.

CHIU, Christine. « Chapter 11 and the Environment », Environmental Policy and Law, vol. 33, no 2, 2003.

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Annexe B – Résumés des chapitres de l’ACEUM

Chapitre sur l’environnement (chapitre 24) et l’Accord de coopération environnementale

Lors de son entrée en vigueur en 1994, l’ALENA était le premier accord de libre-échange à faire le lien entre l’environnement et le commerce grâce à une entente historique parallèle de coopération environnementale : l’Accord nord-américain de coopération dans le domaine de l’environnement (ANACDE). L’ACEUM renforce et modernise les dispositions sur l’environnement en les intégrant dans un chapitre sur l’environnement ambitieux, global et exécutoire. Le chapitre sur l’environnement prévoit un processus de règlement des différends obligatoire et exécutoire pour résoudre toutes les questions de conformité. Il permet également de recourir au mécanisme de règlement des différends plus général de l’ACEUM quand les pays ne parviennent pas à s’entendre au moyen de la consultation et de la coopération.

L’ACEUM comprend également un Accord de coopération environnementale (ACE) parallèle. L’ACE veille à ce que les institutions uniques qui existent depuis 1994 dans le cadre de l’ANACDE soient conservées et modernisées, y compris la Commission de coopération environnementale et son secrétariat, situé à Montréal. Par l’entremise de l’ACE, une Commission modernisée poursuivra la tradition de coopération environnementale trilatérale efficace entre le Canada, le Mexique et les États-Unis, notamment sur les questions environnementales mondiales importantes pour le Canada, comme les changements climatiques.

Chapitres liés aux marchandises

Traitement national et accès aux marchés pour les produits (chapitre 2)

Le chapitre sur le traitement national et l’accès aux marchés pour les produits (TNAM) de l’ACEUM énonce les disciplines fondamentales régissant le commerce des marchandises en vue d’éliminer ou de réduire les obstacles à celui-ci. Les disciplines prévues dans ce chapitre visent à assurer la transparence et la prévisibilité du marché nord-américain et ouvrent des débouchés pour les exportateurs canadiens. Dans ce chapitre, les parties à l’ACEUM ont convenu de préserver les engagements tarifaires déjà étendus qui avaient été pris dans l’ALENA, de ne pas restreindre ni interdire l’importation ou l’exportation de marchandises et d’accorder aux produits importés un traitement aussi favorable que celui dont bénéficient les produits nationaux similaires.

Agriculture (chapitre 3)

Le chapitre sur l’agriculture énonce les obligations et les engagements que les parties à l’ACEUM ont contractés au sujet du commerce des produits agricoles. Des engagements tarifaires et en matière d’accès aux marchés visant les produits agricoles figurent aussi dans le chapitre 2 (Traitement national et accès aux marchés pour les produits). Le chapitre 2 contient également un appendice pour chacune des parties, qui comprend leur liste tarifaire et leurs contingents tarifaires respectifs.

Énergie

Les dispositions régissant le commerce des biens énergétiques, ainsi que d’autres activités dans le secteur de l’énergie, se trouvent dans l’ensemble de l’ACEUM plutôt que dans un chapitre distinct. Cela comprend des disciplines et des dispositions dans les domaines du traitement national et de l’accès aux marchés, des règles d’origine, des procédures douanières et de la facilitation des échanges, du commerce transfrontières des services et de l’investissement. L’ACEUM est également assorti d’une lettre d’accompagnement bilatérale exécutoire entre le Canada et les États-Unis sur les mesures de réglementation et la transparence en matière de réglementation dans le domaine de l’énergie, ce qui témoigne de l’importance du secteur de l’énergie en Amérique du Nord. Les engagements contenus dans l’annexe à la lettre permettront d’accroître la transparence et la coopération en matière de réglementation dans le secteur nord-américain de l’énergie, et comprennent des disciplines concernant l’accès aux installations de transport d’électricité et aux réseaux de pipelines.

Lettre d’accompagnement entre le Canada et les États-Unis sur les ressources en eau

Dans une lettre d’accompagnement portant sur les ressources naturelles en eau, le Canada et les États-Unis ont confirmé que l’ACEUM ne confère aucun droit aux ressources naturelles en eau d’une partie et n’a pas pour effet d’obliger une partie à exploiter ses ressources naturelles en eau à des fins commerciales, y compris en vue de son exportation à grande échelle.

Administration des douanes et facilitation des échanges (chapitre 7)

Le chapitre sur l’administration des douanes et la facilitation des échanges vise à simplifier les procédures douanières, à réduire le fardeau administratif et à assurer une plus grande prévisibilité en matière douanière. L’ALENA de 1994 ne contenait pas de chapitre à ce sujet, de sorte que l’inclusion d’un tel chapitre dans l’ACEUM procurera des avantages additionnels aux commerçants canadiens.

La section A du chapitre établit des obligations qui visent à réduire les frais de transaction que doivent assumer les commerçants en venant simplifier, uniformiser et moderniser les procédures douanières liées au commerce. Cette section aborde les diverses étapes du processus douanier en vue de réduire les formalités administratives à la frontière, contribuant ainsi à ce que les échanges de marchandises se déroulent dans un cadre plus prévisible, plus cohérent et plus transparent.

La section B du chapitre prévoit que les parties coopéreront afin de s’aider mutuellement à appliquer leurs lois et leurs règlements visant à lutter contre les infractions douanières dans le contexte du commerce des produits entre les parties.

Mesures sanitaires et phytosanitaires (chapitre 10)

Le chapitre de l’ACEUM sur les mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS) maintient le droit souverain de chaque partie de prendre les mesures SPS nécessaires pour protéger la santé et la vie des personnes, des animaux ou des végétaux, tout en exigeant que ces mesures soient fondées sur la science, transparentes et appliquées de manière à ne pas créer des obstacles inutiles au commerce. L’objectif consiste à assurer que les gains obtenus sur le plan de l’accès aux marchés dans l’ACEUM ne soient pas annulés par des restrictions commerciales injustifiées liées à des mesures SPS dans les secteurs des produits agricoles et agroalimentaires, du poisson et des fruits de mer, ainsi que des produits forestiers.

Obstacles techniques au commerce (chapitre 11)

Les obstacles techniques au commerce (OTC) sont une forme de barrière non tarifaire découlant des mesures de réglementation portant sur des éléments tels que les caractéristiques d’un produit ou l’étiquetage. Les OTC peuvent avoir une incidence sur l’accès aux marchés parce qu’ils imposent diverses exigences obligatoires à l’égard des produits, qui doivent être remplies avant que ceux-ci puissent accéder à un marché donné à l’étranger. Normalement, les mesures de réglementation sont fondées sur des préoccupations légitimes, comme le besoin de prévoir les mesures de sécurité nécessaires, mais si elles sont mal conçues ou mal utilisées, elles peuvent entraîner un fardeau administratif trop lourd ou un traitement discriminatoire à l’égard de biens fabriqués à l’étranger.

À mesure que les droits de douane diminuent, les obstacles de nature réglementaire peuvent devenir des barrières plus importantes pour les exportateurs canadiens. En poursuivant sur la lancée de l’Accord sur les obstacles techniques au commerce de l’OMC, les dispositions prévues dans le chapitre sur les OTC de l’ACEUM contribueront à garantir que des exigences réglementaires inutiles ou discriminatoires n'érodent pas les principaux gains en matière d’accès aux marchés négociés dans d’autres parties de l’Accord. La mise en place de mécanismes visant à prévenir, à réduire ou à éliminer les obstacles d’ordre réglementaire constitue l’un des principaux aboutissements des négociations de l’ACEUM. Le chapitre sur les OTC : favorise l’application de normes acceptées à l’échelle internationale et reconnaît le rôle qu’elles peuvent jouer pour soutenir une plus grande harmonisation de la réglementation, de bonnes pratiques réglementaires et la réduction des obstacles inutiles au commerce; prévoit que les autorités responsables de l’évaluation de la conformité entre les parties à l’Accord respectent l’obligation relative au traitement national, ce qui aidera à réduire les coûts et les exigences en matière d’essais pour les entreprises canadiennes; favorise une plus grande transparence lors de l’élaboration des règlements techniques et des procédures d’évaluation de la conformité, ce qui offrira aux exportateurs canadiens une plus grande prévisibilité à l’égard des cadres de réglementation étrangers; établit un mécanisme pour aider les parties à répondre aux préoccupations afin d'éviter la création de nouveaux obstacles et de réduire ou d'éliminer les effets négatifs des obstacles existants. Prises ensemble, ces avancées aideront à réduire les coûts et les délais de mise en marché des produits pour les entreprises canadiennes, y compris les petites et moyennes entreprises (PME).

Annexes sectorielles (chapitre 12)

L’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) comprend des résultats propres à divers secteurs, notamment ceux relatifs aux produits pharmaceutiques, aux instruments médicaux, aux produits cosmétiques, aux substances chimiques, aux technologies de l’information et des communications, à l’efficacité énergétique, aux boissons alcoolisées et aux formules alimentaires brevetées. Ces résultats sectoriels viennent compléter les obligations contenues dans le chapitre sur les obstacles techniques au commerce et le chapitre sur les bonnes pratiques de réglementation, qui visent à favoriser une réglementation transparente et prévisible, tout en préservant le droit de chaque partie de réglementer dans l’intérêt public dans le but d’atteindre les objectifs légitimes des politiques gouvernementales, tels que la protection et la promotion de la santé publique, de la sécurité et de l’environnement. Dans ces secteurs particuliers de l’économie nord-américaine, les engagements pris dans les annexes sectorielles sont destinés à favoriser une réglementation efficace qui facilite les échanges entre les parties.

Bonnes pratiques de réglementation (chapitre 28)

Les gouvernements ont recours à des règlements pour atteindre une série d’objectifs stratégiques, comme assurer la santé et la sécurité de leurs citoyens, préserver l’environnement et protéger les consommateurs. Même si la grande majorité des règlements sont conçus pour atteindre des objectifs n’ayant aucun lien avec le commerce, ils peuvent aussi avoir pour effet imprévu d’entraver ou de perturber les échanges. Comme les droits de douane ont diminué partout sur la planète, les obstacles non tarifaires ou de nature réglementaire deviennent de plus en plus les écueils auxquels se butent les exportateurs mondiaux lorsqu’ils désirent accéder à des marchés étrangers. Par exemple, des changements à la réglementation apportés sans qu’un préavis suffisant ait été donné aux entreprises étrangères risquent de limiter grandement les débouchés dans un pays donné, tout en conférant un avantage aux entreprises nationales. Pour obtenir de bons résultats en matière de réglementation, les gouvernements devraient adopter de bonnes pratiques réglementaires qui favorisent l’ouverture, la transparence et la prise de décisions fondées sur des données probantes. Les pays qui adoptent de bonnes pratiques de réglementation peuvent avoir confiance dans les systèmes réglementaires des autres pays, ce qui peut faciliter le commerce. La confiance dans le régime de réglementation d’un partenaire commercial favorise également la coopération dans ce domaine, de sorte que les organismes de réglementation de différents pays peuvent choisir de travailler ensemble pour harmoniser leurs cadres réglementaires, ce qui se traduit par une réduction des obstacles inutiles au commerce.

Chapitres liés aux services

Commerce transfrontières des services (chapitre 15)

Le chapitre sur le commerce transfrontières des services porte sur le commerce des services qui sont fournis à partir du territoire d’un pays dans le territoire d’un autre pays. Les services sont un élément clé des chaînes de valeur mondiales, car ils contribuent à favoriser des activités à valeur ajoutée. Au Canada, le secteur des services est à l’origine d’une forte proportion des emplois et de la valeur des échanges commerciaux, particulièrement lorsque l’on tient compte des services intégrés à des produits.

Les fournisseurs canadiens de services sont actifs aux États-Unis et au Mexique dans tous les secteurs de services de l’économie, ce qui comprend les voyages et les services aux entreprises, ainsi que le transport. De 2016 à 2018, le Canada a exporté en moyenne chaque année pour 63,9 milliards de dollars de services vers les États-Unis, d’où il a importé pour 76 milliards de dollars de services, ce qui classe les États-Unis au premier rang des partenaires du Canada au chapitre du commerce bilatéral des services. En ce qui concerne le Mexique, de 2016 à 2018, le Canada a exporté en moyenne chaque année pour 1,4 milliard de dollars de services vers ce pays, d’où il a importé pour 3,1 milliards de dollars de services, ce qui fait du Mexique son septième partenaire en importance sur le plan du commerce bilatéral des services.

En s’appuyant sur les avantages qui découlent des disciplines sur le commerce transfrontières des services prévues dans l’ALENA et dans l’Accord général sur le commerce des services (AGCS) de l’OMC, le chapitre 15 de l’ACEUM permet d’assurer une prévisibilité continue pour les fournisseurs de services canadiens qui exercent des activités aux États-Unis et au Mexique. Le chapitre conserve des règles fondamentales en ce qui concerne le traitement que chaque partie doit accorder aux fournisseurs de services des autres parties, l’élaboration et l’administration de mesures, et les engagements consolidés en matière d’accès aux marchés, ainsi que des lignes directrices non contraignantes pour la négociation d’accords de reconnaissance mutuelle à l’égard des services professionnels réglementés.

Services financiers (chapitre 17)

Le chapitre modernisé sur les services financiers contribue à placer les fournisseurs de services financiers du Canada, du Mexique et des États-Unis sur un pied d’égalité en établissant un cadre de règles générales adaptées à la nature unique du secteur. Le chapitre prévoit également des mesures de protection pour les investissements dans des institutions financières des trois pays, établit un cadre pour assurer la transparence en matière de réglementation et comprend des dispositions pour adapter le mécanisme de règlement des différends entre États au secteur des services financiers. Comme dans le chapitre sur l’investissement, aucun mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États n’est prévu à l’égard du Canada dans le chapitre sur les services financiers. Enfin, le chapitre sur les services financiers comprend une solide exception prudentielle permettant aux autorités de réglementation financière de prendre les mesures nécessaires pour protéger la sécurité et la solidité du système financier.

Investissement et règlement des différends

Investissement (chapitre 14)

L’inclusion d’un chapitre sur l’investissement dans un accord de libre-échange a pour but d’établir un cadre qui procure aux investisseurs un climat d’investissement prévisible, stable, transparent et fondé sur des règles. Un tel chapitre aide à assurer que les investisseurs canadiens sont traités équitablement et ont des chances égales de profiter des occasions d’affaires qui se présentent à l’étranger. Dans l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM), le chapitre sur l’investissement a été actualisé pour correspondre aux pratiques suivies par les trois parties dans leurs plus récents traités. Le chapitre contient un ensemble complet et rigoureux d’obligations semblables à celles que l’on trouve dans d’autres accords de libre-échange comme l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP). Parmi ces obligations, mentionnons le traitement national; le traitement de la nation la plus favorisée; une norme minimale de traitement des investissements; des disciplines sur l’utilisation des prescriptions de résultats; l’interdiction de procéder à des expropriations sauf à des fins d’intérêt public et moyennant le versement rapide d’une indemnité effective; l’interdiction concernant la possibilité pour les investisseurs d’exercer une discrimination fondée sur une nationalité donnée pour embaucher des dirigeants ou nommer des membres du conseil d’administration; et la prévisibilité des transferts de capitaux.

L’ACEUM ne contient pas de mécanisme trilatéral de règlement des différends entre investisseurs et États (RDIE). Dans le cadre de l’ACEUM, les États-Unis et le Mexique se sont entendus pour conserver un mécanisme bilatéral de RDIE pour un ensemble limité de disciplines et de secteurs. Par ailleurs, les trois parties ont convenu que le mécanisme de RDIE de l’ALENA original continuera de s’appliquer uniquement aux investissements faits avant l’entrée en vigueur de l’ACEUM pendant une période de transition de trois ans. En dehors de cette période de transition prévue pour les investissements préexistants, aucun investisseur d’une partie à l’ACEUM ne pourra déposer de plainte contre le Canada au titre d’un mécanisme de RDIE en vertu de l’ACEUM. En ce qui concerne le Canada, en vertu de l’ACEUM, seul le mécanisme de règlement des différends entre États pourra être invoqué en vue de faire appliquer une obligation prévue dans le chapitre sur l’investissement. Il convient de noter que les investisseurs canadiens au Mexique et les investisseurs mexicains au Canada pourront recourir au mécanisme de RDIE du PTPGP.

Règlement des différends (chapitre 31)

Le chapitre 31 établit un mécanisme de règlement des différends entre États qui procure un moyen transparent, ouvert et clair pour résoudre les différends entre les parties à l’ACEUM au sujet de l’interprétation ou de l’application de l’Accord. Ce mécanisme s’applique à presque toutes les obligations prévues dans l’Accord, y compris celles dans les domaines du travail et de l’environnement. Le chapitre prévoit un processus pour régler les désaccords par la coopération, y compris par des consultations et la médiation, afin que les parties recourent uniquement au mécanisme formel lorsqu’il a été impossible de régler le différend par d’autres moyens.

Si le différend ne peut être réglé par la coopération, le chapitre prévoit la création de groupes spéciaux arbitraux pour évaluer si une partie a manqué à ses obligations. S’il s’avère que la partie n’a pas rempli ses obligations aux termes de l’Accord, le chapitre exige que la partie contrevenante se conforme à ses engagements (autrement dit qu’elle retire la mesure à l’origine du manquement), à défaut de quoi elle s’expose à des mesures de rétorsion (autrement dit la suspension des avantages dont l’effet est équivalent).

Propriété intellectuelle

Droits de propriété intellectuelle (chapitre 20)

L’ACEUM contient un chapitre complet sur la propriété intellectuelle (PI), qui prévoit des dispositions sur presque tous les domaines liés à la protection et à l’application des droits de PI, tels que le droit d’auteur et les droits connexes, les marques de commerce, les indications géographiques, les dessins industriels, les brevets, la PI pour les produits pharmaceutiques, la protection des données relatives aux produits chimiques agricoles, les secrets commerciaux, ainsi que la lutte contre les infractions au moyen de recours civils et pénaux et de mesures prises à la frontière. Ce chapitre s’appuie sur les engagements pris par les parties au sujet de la PI dans l’ALENA original, ainsi que dans l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) de l’Organisation mondiale de la Santé (OMC) et certains traités relevant de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). En venant renforcer les engagements pris par les parties au sujet de la PI, le chapitre sur la PI tient aussi compte de l’évolution récente de l’économie numérique depuis que l’ALENA original a été négocié, notamment en ce qui concerne le droit d’auteur dans l’environnement numérique. Par exemple, le chapitre sur la PI contient des dispositions qui poursuivent sur la lancée des « traités Internet » de l’OMPI et reconnaît que le régime de transmission d’avis du Canada, reposant sur la responsabilité du fournisseur de services Internet (FSI), constitue une approche efficace pour lutter contre les violations en ligne.

Dans la plupart des domaines, les lois et les politiques en vigueur au Canada en matière de PI sont déjà conformes aux résultats négociés dans l’ACEUM. Toutefois, le Canada devra apporter certains changements à son régime de PI au moment de l’entrée en vigueur de l’Accord dans le domaine du droit d’auteur et des droits connexes (traitement national complet pour le droit d’auteur et les droits connexes; sanctions pénales pour protéger l’information sur le régime des droits; augmentation de la durée de protection du droit d’auteur dans certains cas bien précis, par exemple, une protection des enregistrements sonores pendant 75 ans après la date de leur première publication autorisée, au lieu de 70 ans comme c’est le cas actuellement au Canada), et dans l’application des droits de propriété intellectuelle (mesures d’office par les autorités frontalières à l’égard de marchandises en transit soupçonnées d’être des produits de marque contrefaits ou des produits piratés portant atteinte au droit d’auteur; et de nouvelles infractions criminelles pour le détournement non autorisé et délibéré de secrets commerciaux).

Commerce et peuples autochtones

Dans l’ACEUM, le Canada a réussi à obtenir un certain nombre de résultats prioritaires à l’égard des peuples autochtones, qui s’inscrivent dans le sens des efforts du gouvernement pour promouvoir les droits, la prospérité et le développement durable des Autochtones au Canada et dans le monde. Les obligations constitutionnelles du Canada envers les peuples autochtones ne peuvent être ni supplantées ni compromises par les engagements pris dans un accord de libre-échange. Pour que cela soit bien clair, le gouvernement a inclus dans l’Accord une exception générale relative aux droits des peuples autochtones. Cette exception témoigne de la volonté des trois parties à faire en sorte que les obligations prévues dans l’Accord n’interfèrent pas avec les obligations juridiques de l’une ou l’autre partie envers les peuples autochtones.

Comme il l’a fait dans tous ses accords de libre-échange, le Canada a conservé toute latitude pour adopter des politiques afin de faire avancer les intérêts des peuples et des entrepreneurs autochtones, y compris dans les domaines des services, de l’investissement, de l’environnement, des entreprises appartenant à l’État et des marchés publics. D’autres importants résultats obtenus témoignent du rôle clé des peuples autochtones dans le domaine de l’environnement, notamment en ce qui concerne la conservation de la biodiversité. Le chapitre sur les produits textiles et les vêtements élargit également une disposition qui figurait dans l’ALENA afin de prévoir une procédure particulière permettant d’établir plus facilement l’origine des produits textiles et des vêtements autochtones.

ANNEXE C : Liste des acronymes

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