Avis aux exportateurs

Contrôles à l'exportation sur les armes chimiques et biologiques, les précurseurs et les équipements et la technologie de production

Nº de série: 74
Date: 1er mai 1994

Table des matières

Objet

1. Le présent avis a pour objet de susciter une prise de conscience à l'égard des risques qu'entraînent la prolifération des armes chimiques et biologiques et l'utilisation clandestine possible des produits chimiques à double usage, des agents biologiques et des équipements à double usage pour la fabrication de telles armes et de fournir des renseignements sur le programme canadien de contrôles à l'exportation des produits de ce genre.

2. Le présent avis, qui remplace l'Avis aux exportateurs, no de série 55, Contrôle des exportations d'armes chimiques, de précurseurs et des équipements et de la technologie de production, datée du 27 septembre 1991, complète la publication Guide des contrôles à l'exportation du Canada paru en avril 1994.

La politique du Canada

3. Le gouvernement du Canada a fait figurer la prolifération au premier rang de ses préoccupations en matière de sécurité. La prolifération des armes chimiques, biologiques et nucléaires et de leurs systèmes de lancement a un effet déstabilisateur sur la paix à l'échelle régionale et mondiale et est considérée, par conséquent, comme faisant peser une menace permanente sur la sécurité du Canada.

4. Le Canada n'a plus d'armes chimiques. Il y a quelques années, il a informé la communauté internationale qu'il avait détruit le gros des stocks d'agents utilisables dont il s'était doté pour d'éventuelles représailles lors de la Seconde Guerre mondiale. Un programme, qui a pris fin en 1991, a été entrepris afin de détruire la petite quantité de matières toxiques qui restaient, en conformité avec les normes rigoureuses du Canada en matière de santé, de sécurité et d'environnement.

5. En ce qui concerne les armes chimiques et biologiques, la politique du Canada est claire et sans équivoque. Notre pays n'entend à aucun moment mettre au point, produire, acquérir, entreposer ou utiliser des armes chimiques ou biologiques.

Contexte du contrôle des armes chimiques et biologiques

6. Comme certains pays continuent de chercher à se doter d'un arsenal d'armes chimiques et(ou) biologiques offensives, les pays comme le Canada doivent continuer de se préoccuper de l'utilisation clandestine possible des produits et de la technologie pouvant servir à la production de ces armes. L'utilisation des armes chimiques pendant la guerre opposant l'Iran et l'Iraq dans les années 80 et la découverte d'un important stock d'armes chimiques en Iraq après la guerre du Golfe ont amené la communauté internationale à conclure les négotiations sur la Convention sur les armes chimiques qui interdit la mise au point, la production, le stockage et l'utilisation des armes chimiques. Cette convention, qui a été signée le 13 janvier 1993 par le Canada et d'autres pays, devrait entrer en vigueur en 1995. Des interdictions semblables concernant les armes biologiques existent dans la Convention de 1972 sur les armes biologiques et à toxines, que le Canada a signée et ratifiée.

7. Avec la fin des tensions de la Guerre froide, l'attention se concentre de plus en plus sur la menace que fait peser sur la paix et la stabilité régionales la prolifération des équipements et de la technologie liés aux armes chimiques et biologiques. L'arrêt de cette prolifération est devenu un objectif primordial du Canada et de ses alliés.

8. La prolifération demeure, par conséquent, une préoccupation très réelle et, à cette fin, le gouvernement et l'industrie doivent continuer de faire preuve de vigilance.

Le Groupe de l'Australie

9. Depuis 1985, le Canada tient régulièrement des consultations officieuses avec un groupe de pays qui sont sur la même longueur d'onde quant aux mesures à prendre à l'échelle nationale pour réduire les possibilités d'utilisation et de prolifération des armes chimiques ou biologiques. Connus sous le nom de « Groupe de l'Australie », ces pays ont réussi dans une large mesure à établir un cadre de contrôle en suscitant une prise de conscience à l'égard de ces questions et à harmoniser leurs politiques et procédures de contrôle des exportations. Outre le Canada, le « Groupe de l'Australie » comprend actuellement l'Argentine, l'Australie, l'Autriche, la Belgique, le Danemark, la République fédérale d'Allemagne, la Finlande, la France, la Grèce, la Hongrie, l'Islande, l'Irlande, l'Italie, le Japon, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Nouvelle-Zélande, la Norvège, le Portugal, l'Espagne, la Suède, la Suisse, le Royaume-Uni et les États-Unis.

10. Les pays participant à ces consultations internationales ont également entamé un dialogue à l'échelle nationale avec les représentants de l'industrie. Au Canada, il y a eu des consultations avec les industries et les organismes engagés dans la production et la distribution des produits chimiques, des agents biologiques et des équipements à double usage qui suscitent des préoccupations. Ce dialogue a renforcé la conviction du gouvernement que l'industrie canadienne est résolue à éviter de contribuer à la prolifération des armes chimiques ou biologiques. L'industrie reconnaît en outre qu'une telle participation serait préjudiciable à sa réputation ainsi qu'à ses activités futures.

Contrôles à l'exportation du Canada

Les armes et agents chimiques

11. L'exportation des armes et agents chimiques servant à des fins militaires est expressément contrôlée en vertu de l'article 2007 de la Liste des marchandises d'exportation contrôlée. Par ailleurs, les produits chimiques industriels courants, lorsqu'ils sont combinés à d'autres produits chimiques, peuvent servir à fabriquer des armes chimiques. Cinquante-quatre (54) de ces produits chimiques industriels, souvent appelés « précurseurs d'armes chimiques », sont identifiés et contrôlés en vertu de l'article 7011 de la Liste des marchandises d'exportation contrôlée.

Les usines d'armes chimiques, les équipements et la technologie de production

12. Les équipements et la technologie de production des armes chimiques servant à des fins militaires sont expressément contrôlés en vertu de l'article 2018 de la Liste des marchandises d'exportation contrôlée. Toutefois, l'industrie canadienne devrait savoir que les usines, ainsi que les équipements et la technologie de production, même s'ils ne sont pas spécialement conçus pour la fabrication d'armes chimiques, ou la production d'armes pourraient être adaptés pour servir à ces fins non civiles. Ces produits à double usage pourraient être adaptés ou détournés de leur but original pour servir à la fabrication d'armes chimiques, et être convoités par les pays qui cherchent à se doter d'un arsenal d'armes chimiques.

13. Le matériel civil, non conçu expressément pour la production d'armes chimiques, ou la production d'armes peut aller d'un simple article à une usine de produits chimiques tout entière. Il pourrait comprendre, entre autres, les systèmes de détection des gaz toxiques, les systèmes de condensateurs, les conteneurs préfabriqués, les cuves de réacteur, les pompes, les soupapes, les filtres, les agitateurs, les échangeurs de chaleur, les appareils de distillation et les incinérateurs, surtout s'ils sont faits de matériaux résistant à la corrosion. Le matériel civil qui peut servir ou s'adapter à des applications civiles et militaires est identifié et contrôlé en vertu de l'article 7012 de la Liste des marchandises d'exportation contrôlée.

14. L'exportation de la technologie connexe est contrôlée en vertu de l'article 7015 de la Liste des marchandises d'exportation contrôlée.

Armes biologiques

15. L'exportation des armes biologiques ou à toxines ainsi que des équipements de production connexes servant à des fins militaires est expressément contrôlée en vertu des articles 2007 et 2018 de la LMEC. En outre, le Canada, de concert avec d'autres pays membres du Groupe de l'Australie, a mis en oeuvre des contrôles concernant les agents biologiques et à toxines. Ces agents comprennent les agents pathogènes humains, plantes et animaux, sous forme de virus, de rickettsies, de bactéries, de micro-organismes, de toxines ou de champignons. Ces agents sont contrôlés expressément en vertu de l'article 7021 de la LMEC.

Armes biologiques ou équipements de production à double usage

16. Les équipements et la technologie de production d'armes biologiques servant à des fins militaires sont expressément contrôlés en vertu de l'article 2018 de la Liste des marchandises d'exportation contrôlée. Cependant, tout comme pour les armes chimiques, l'industrie canadienne doit savoir que certains pays peuvent chercher à obtenir des équipements et la technologie de fabrication de produits biologiques, même s'ils ne sont pas conçus spécialement pour la fabrication d'armes biologiques, pour s'en servir à des fins autres que commerciales ou civiles. Ces produits à double usage pourraient être adaptés ou détournés de leur but original pour servir à la fabrication d'armes biologiques et être convoités par les pays qui cherchent à se doter d'un arsenal d'armes biologiques.

17. Le matériel civil, non conçu expressément pour la production d'armes biologiques, peut aller d'un simple article à des laboratoires biologiques entiers. Il pourrait comprendre, entre autres, les installations et équipements de confinement de niveau P3 ou P4, les fermenteurs, les séparateurs centrifuges, le matériel de filtration à débit transversal ou le matériel de lyophilisation. Le matériel civil qui peut servir ou s'adapter à des applications civiles et militaires est identifié et contrôlé en vertu de l'article 7022 de la Liste des marchandises d'exportation contrôlée.

Les licences d'exportation

18. Quiconque désire exporter des matières chimiques ou biologiques, des équipements ou les technologies visés aux articles 2007, 2018, 7011, 7012, 7015, 7021 ou 7022 de la Liste des marchandises d'exportation contrôlée doit demander et obtenir une licence d'exportation avant que l'un quelconque de ces articles quitte le Canada, compte tenu des exceptions suivantes:

  1. Aucune licence n'est exigée pour les produits du Groupe 2 (p. ex. 2007 et 2018) s'ils sont exportés vers les États-Unis d'Amérique.
  2. Aucune licence n'est exigée pour les produits du Groupe 7 (p. ex. 7011, 7012, 7015, 7021, 7022) s'ils sont exportés vers les pays membres du Groupe de l'Australie.

Les renseignements sur la façon de demander une licence d'exportation figurent dans la publication intitulée "Guide des contrôles à l'exportation du Canada, avril 1994" qu'on peut se procurer auprès de la Direction du contrôle des exportations.

Circonstances légitimes et pouvant éveiller des soupçons

19. L'industrie canadienne doit faire preuve de vigilance lorsqu'elle exporte des produits pour s'assurer que les précurseurs chimiques, les agents biologiques et les équipements de fabrication connexes exportés ne servent qu'à des fins civiles légitimes. Les sociétés doivent être prévenues des demandes de renseignements inhabituelles. Les circonstances où les activités commerciales peuvent éveiller des soupçons figurent à l'annexe A. Il faut faire preuve de la plus grande prudence dans les cas où il existe un certain nombre d'éléments de ce genre. Les sociétés sont encouragées à communiquer avec la Direction du contrôle des exportations pour fournir des renseignements ou obtenir des conseils sur les cas inhabituels. La Direction désire aider l'industrie à protéger sa bonne réputation et s'efforcera de prêter son concours dans les plus brefs délais.

Pour renseignements

20. Pour obtenir de l'aide ou des conseils, communiquer avec :

La Direction du contrôle des exportations
Ministère des Affaires étrangères et Commerce international
Édifice Lester B. Pearson
125, promenade Sussex
Ottawa (Ontario) K1A 0G2

Téléphone : 613-996-2387
Télécopieur : 613-996-9933

Annexe A : Circonstances où les activités commerciales peuvent éveiller des soupçons

  • Contact de la part d'un client jusque là inconnu (y compris les clients qui demandent une aide technique) et dont l'identité est incertaine.
  • Transaction mettant en cause un intermédiaire ou un destinataire qui est inhabituelle, compte tenu de ses activités commerciales habituelles.
  • Explications insuffisantes du client, ou réponses évasives de sa part à des questions sur les produits chimiques à fabriquer, les équipements de production connexes et l'utilisation qui sera faite de ces produits ou équipements.
  • Hésitation du client à fournir des renseignements sur l'emplacement de l'usine ou l'endroit où l'équipement doit être installé.
  • Manque d'explications du client concernant les matières premières chimiques qui doivent être utilisées avec l'équipement.
  • Hésitations du client à fournir des réponses précises aux questions usuelles d'ordre commercial ou technique.
  • Contact de la part d'un client dont les activités sont liées au secteur militaire (p. ex. quelqu'un qui représente un ministère de la Défense ou des forces armées).
  • Non-vraisemblance de la raison invoquée par un client pour justifier sa demande d'équipement, compte tenu de ses activités habituelles ou de ses besoins en technologie.
  • Équipements devant être installés dans un endroit faisant l'objet d'un contrôle de sécurité strict, p. ex. un site militaire ou situé à proximité d'installations militaires ou un site dont l'accès est très restreint.
  • Équipements devant être installés dans un endroit suspect ou inhabituel.
  • Demande de la part d'un client concernant l'expédition ou l'étiquetage de marchandises non conforme aux modalités généralement admises à cet égard.
  • Modalités de paiement inhabituellement avantageuses, p. ex. un prix plus élevé ou un taux d'intérêt supérieur à celui du marché, ou encore un paiement forfaitaire en espèces.
  • Demande insistante de la part d'un client pour que soient gardés confidentiels la destination finale ou les détails concernant les produits à livrer.
  • Demande de mesures de sécurité excessives par rapport à la nature de l'équipement en question.
  • Demandes extraordinaires, par exemple, une quantité excessive de pièces de rechange, ou l'absence de demande de pièces normalement nécessaires.
  • Absence de demande de garantie de fonctionnement, de bon de garantie ou de contrat d'entretien.
  • Absence de demande d'aide technique ou de formation pour l'installation ou l'exploitationde l'équipement.
  • Demande d'un client pour qu'il soit mis fin à un projet inachevé.
  • Refus à un entrepreneur de l'accès aux parties de l'usine normalement considérées comme étant accessibles.
  • Répartition par un client d'un contrat de construction ou de modernisation d'une usine sans que des renseignements suffisants soient fournis sur l'ensemble des travaux à effectuer et (ou) la destination finale de l'usine.
  • Emballage ou éléments d'emballage non conformes au mode d'expédition ou à la destination déclarée.
  • Modifications à une usine ou à des équipements dans des installations existantes ou prévues qui changent sensiblement la capacité de production et qui pourraient faciliter la fabrication d'armes chimiques ou de précurseurs d'armes chimiques.
  • Démarches faites par des ressortissants étrangers pour s'inscrire comme étudiants ou être engagés comme chercheurs dans le cadre de projets portant sur tout aspect d'organismes pathogènes ou de toxines.
  • Tendance de ressortissants étrangers à assister à des conférences et des séminaires portant sur tout aspect de la culture, de la production, de la manipulation des propriétés et du stockage d'organismes pathogènes ou de toxines.